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Intervention de Marc Le Fur

Réunion du 10 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 14, amendements 69 96

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur :

Je souhaite prendre la parole sur la question des origines, une question qui me paraît fondatrice et sur laquelle la commission a repoussé le projet du Gouvernement. Lors du vote en commission, je me suis singularisé, ayant considéré que la recherche des origines était légitime.

Si l'on en croit les chiffres figurant dans le rapport de l'Agence de la biomédecine pour 2008, on compte chaque année environ 20 000 assistances médicales à la procréation. Pour la plupart de ces 20 000 AMP, qui ont lieu au sein d'un couple, la question des origines ne se pose pas. Elle se pose, en revanche, dans le cas d'un don de gamète – un peu plus de 1 000 cas par an – et dans le cas d'un don d'ovule – environ 200 cas par an.

L'assistance médicale à la procréation, qui existe depuis plusieurs dizaines d'années, est montée en puissance lors des années soixante-dix et quatre-vingt. On compte désormais de nombreuses personnes qui sont le fruit d'une AMP, dont une bonne proportion d'adolescents, de jeunes adultes et même d'adultes plus avancés dans la vie, qui se posent la question de leur origine. Ces personnes savent ce qu'elles ne sont pas, et demandent à savoir ce qu'elles sont. Comment répondre à cette question ?

Très souvent, ces jeunes hommes et femmes savent depuis leur plus tendre enfance qu'ils ne sont pas les enfants biologiques de l'un ou l'autre de leurs parents. Ils le savent, car les familles sont raisonnables, et plutôt que d'entretenir des secrets, des illusions, des non-dit, plutôt que d'organiser une société « à la Mauriac », elles préfèrent dire comment les choses se sont passées : elles jugent préférable de dire la vérité plutôt que de voir celle-ci se révéler d'elle-même plus tard – car, on le sait, c'est lors de révélations tardives et brutales que surviennent les traumatismes.

Cependant, elles ne peuvent pas tout dire, puisqu'en l'état actuel de notre droit, elles peuvent dire à l'enfant qui il n'est pas, mais ne peuvent lui révéler son origine. Évidemment, cela pose des problèmes, ne serait-ce qu'en termes sanitaires : n'est-il pas gênant de ne pas pouvoir répondre à la question du médecin traitant : « Avez-vous des antécédents de telle ou telle affection dans votre famille ? »

Au-delà, le plus important me paraît être la question morale : qui veut être celui qui dissimule une histoire qui ne lui appartient pas ? Qui veut être celui qui, d'une manière ou d'une autre, refuse la vérité à l'enfant qui veut savoir ? Voulons-nous être celui-là et nier cette liberté fondamentale de savoir d'où l'on vient ?

Le principal argument s'opposant à la révélation des origines consiste à dire que cela reviendrait à prôner le « tout génétique », les bien-pensants étant, eux, partisans d'un « tout culturel ». Pour ma part, je pense que la nature est faite pour être corrigée, dirigée, transcendée, mais certainement pas niée : elle existe dans la construction de la personne, et on ne saurait la nier.

Que s'est-il passé au cours des trente ou quarante dernières années ? L'évolution des moeurs au cours des années soixante-dix, quatre-vingts et quatre-vingt-dix a conduit à dissocier la sexualité de la reproduction. Désormais, nous tendons vers une dissociation de la reproduction de la famille. Je le dis clairement, je n'adhère pas à ce modèle.

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