La France est seule au monde à avoir privatisé sa première chaîne publique.
À chaque victoire électorale de la droite a correspondu une nouvelle loi audiovisuelle consolidant la situation du groupe Bouygues.
Au lendemain de 1993, la loi de l'excellent M. Carignon a permis d'accumuler les présents aux pieds du groupe, grâce au déplafonnement de 24 % à 49 % de la fraction du capital de TF1 susceptible d'être détenu par une même personne, et à la prolongation automatique, sans appel à la concurrence, de l'autorisation d'émettre du groupe.
Dès le mois de juin 2002, au vu des éminents services rendus par TF1 pendant la campagne présidentielle, tout a été fait pour retarder l'arrivée de la TNT et pour torpiller le projet numérique de France Télévisions.
En 2006, la loi portant création d'une « télévision du futur » ne tarda pas à adoucir l'ordinaire des opérateurs privés en leur octroyant une chaîne « bonus » sur la TNT.
Aujourd'hui, en une sorte d'apothéose, les groupes privés exaucent leur plus vieux rêve en s'appropriant les ressources publicitaires de France Télévisions, soit, en 2007, 850 millions d'euros !
La publicité empêcherait France Télévisions de produire de bonnes émissions pour cause d'audimat : tel est l'alibi qui justifie ce hold-up. C'est une bien curieuse conception que celle selon laquelle une télévision populaire est forcément de mauvaise qualité. La publicité n'est pas un marqueur de la qualité : il existe de très bonnes télévisions avec publicité comme il en existe de très mauvaises sans publicité. Chacun s'extasie par exemple sur la BBC, mais quiconque y a regardé de près sait que BBC 1, pourtant sans publicité, est une chaîne médiocre.
Imagine-t-on une chaîne de télévision qui n'ait pas l'ambition de l'audience ? Elle se condamnerait d'elle-même.
En outre, étrange est le traitement commun des chaînes publiques, comme si elles constituaient un bloc homogène : la publicité sera supprimée sur toutes les antennes à 20 heures. Pourtant, la grande force de la télévision publique réside précisément dans sa logique de bouquet.
L'offre de télévision sans publicité existe déjà : Arte, sans être dans le groupe France Télévisions, est entièrement publique. Elle offre à qui le souhaite la possibilité de regarder une chaîne publique sans publicité et de grande ambition culturelle.
En dépit de ce que l'on a souvent écrit, les socialistes n'ont jamais souhaité la suppression de la publicité depuis la privatisation de TF1.