Nous voici sans doute saisis du projet de loi le plus emblématique du sarkozysme régnant : s'y retrouvent pêle-mêle l'aspiration monarchique, le cynisme politique, les connivences avec l'oligarchie et la volonté de puissance. Le chef de l'État – ce « téléprésident » – estime que la télévision est son affaire à lui, et à lui seul.
Le 8 janvier dernier, sans qu'aucune réflexion professionnelle ou collective n'ait été engagée et alors que les équilibres économiques du secteur audiovisuel relèvent de l'horlogerie fine, le chef de l'État a décidé tout seul comme un grand – si j'ose dire – de supprimer la publicité sur les chaînes publiques pour en faire cadeau à ses amis du club du Fouquet's : MM. Bouygues, Bolloré et consorts. Stupeur sur les écrans ! Cette mesure n'était évidemment réclamée par personne, sauf TF1 qui, quelques semaines auparavant, avait remis au Président de la République un livre blanc faisant état des difficultés du groupe Bouygues. N'ayant pas brillé par son discernement, celui-ci n'a pas su prendre le virage de la TNT et constate l'érosion régulière de ses parts de marché. Voilà pourquoi TF1 appelle au secours le Président de la République, qui ne saurait rester insensible à la détresse de son ami Martin Bouygues. Ainsi s'écrit l'histoire de la télévision.
Le groupe Bouygues, d'ailleurs, a toujours milité pour la suppression de la publicité sur la télévision publique. Voici une dizaine d'années, il a même engagé sans succès un recours à Bruxelles pour tenter d'obtenir gain de cause.
Huit mois plus tard, nous nous retrouvons avec cet invraisemblable projet qui va créer deux taxes et mobiliser d'emblée 450 millions d'euros d'argent public en pleine crise financière et économique…