Madame la secrétaire d'État, je vous demande de déposer un amendement de suppression de cet alinéa 4. Laissons les médecins et les spécialistes travailler en paix. Laissez-leur un peu d'air, laissez-les innover !
Quant à l'article 23, qui est le coeur du dispositif puisqu'il concerne la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, quelle déception ! Il maintient le dispositif antérieur d'interdiction-dérogation que semblent également vouloir conserver le rapporteur et une partie des députés de la majorité avec, comme principale raison, qu'il n'y aurait pas de différence entre ce principe et celui de l'autorisation encadrée puisqu'il ne gênerait en rien les progrès de la recherche et respecterait les convictions attachées à la dignité de l'embryon humain.
Cette approche me semble restrictive, d'abord parce que le dispositif actuel n'est pas complètement satisfaisant, ensuite parce qu'il peut pénaliser la recherche.
Dans le rapport, nous lisons, à la page 63 que, tout en réaffirmant le principe de l'interdiction de la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, l'article 23 « aménage, de façon désormais permanente, les possibilités dérogatoires de mener de telles recherches ». Ne jouons pas sur les mots. Que signifie une permanence des possibilités dérogatoires sinon une autorisation ? Donc franchissons le pas !
Le Conseil d'État a, lui-même, récemment proposé, dans ses recommandations, d'autoriser ces recherches tout en conservant les conditions strictes requises dans le cadre des dérogations.
Plus important encore : dans la pratique, des avancées scientifiques n'ont pu être autorisées, voire évaluées. C'est le cas de la congélation ultrarapide des ovocytes, la seule méthode autorisée en France étant la congélation lente. Alors qu'un peu partout en Europe et dans le reste du monde – Belgique, Italie, Espagne, Portugal, Japon, États-Unis, Argentine – la technique de congélation ultrarapide des ovocytes est autorisée dans le cadre de la fécondation in vitro et de la gestion quotidienne du don d'ovocytes, notre pays n'a toujours pas accès à cette technique. Pourquoi ? Parce que les demandes d'évaluation, formulées notamment par le professeur Frydman, ont été refusées par l'AFSSAPS et l'ABM en raison d'une interprétation particulièrement discutable des lois de bioéthique par le Conseil d'État, qui assimile cette technique à la recherche sur l'embryon.
Voilà un exemple concret qui montre la nécessité d'autoriser la recherche sur l'embryon en maintenant un cadre strict. Ce principe aurait le mérite de la clarté, de la lisibilité, de la transparence : il permettrait de respecter la singularité de l'embryon humain tout en évitant de porter atteinte à la liberté de la recherche.
Si le texte qui nous est proposé n'évolue pas, il laissera perdurer une position ambiguë tendant à faire croire que certaines recherches sont plus conformes à l'éthique que d'autres. Mettons fin à cette suspicion, d'autant que tout le monde s'accorde à reconnaître la qualité des contrôles réalisés par l'Agence de la biomédecine.
Une dernière remarque : avec notre principe d'interdiction-autorisation, le chercheur Robert Edwards, pionnier en matière de fécondation in vitro, aurait certes pu mener ses recherches pour la mise au point de la FIV, mais on lui aurait interdit d'aller plus loin et il n'aurait pas pu créer des embryons. Je crains qu'avec le maintien de ce dispositif, la France puisse malheureusement revendiquer le Nobel de la frilosité !
Monsieur le rapporteur, il est encore temps de faire évoluer les choses et de passer outre aux calculs électoraux de l'Élysée. Vous savez de quoi je parle.