Cet amendement vise à rétablir un équilibre, en matière de responsabilité, entre deux situations.
En vertu de l'article 2224 du code civil, les actions en responsabilité civile susceptibles d'être engagées contre l'expert qui exerce ses activités hors du cadre des ventes publiques se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le demandeur a connu, ou aurait dû connaître, les faits lui permettant d'exercer cette action, c'est-à-dire, en l'occurrence, à compter du jour où il a eu, ou aurait dû avoir, connaissance de l'erreur d'expertise. C'est un point dont nous avions débattu il y aura bientôt deux ans, lors de la discussion de la loi relative à la réduction des conditions de prescription.
En vertu de l'article 2232 du même code, ce délai peut d'ailleurs atteindre jusqu'à vingt ans après la découverte de l'erreur, du fait d'un report du point de départ, ou de la suspension ou de l'interruption de la prescription.
Or cette erreur peut n'être « connue » ou « découverte » que fort longtemps après l'expertise. Aussi l'action en responsabilité contre l'expert peut-elle être valablement engagée de longues années après cette expertise.
L'expert qui exerce ses activités en dehors du cadre des ventes publiques est ainsi défavorisé.
Du point de vue de la protection du consommateur, qu'il soit acheteur ou vendeur, le délai de cinq ans, exceptionnel par rapport au droit commun de la garantie décennale des entreprises, est particulièrement pénalisant, dans la mesure où les transactions sur le marché de l'art interviennent le plus souvent après le délai actuel de cinq ans suivant l'achat, à l'occasion de décès, de divorces ou de remboursements de dettes, par exemple.
Ainsi, en pratique, les particuliers ne se trouvent que rarement en mesure de faire jouer la responsabilité de l'expert. Il en résulte une véritable lacune dans la défense des droits des consommateurs, alors même que le renforcement des garanties accordées aux investisseurs doit être un moyen privilégié de dynamiser le marché de l'art dans notre pays.
Cet amendement propose ainsi de régler trois problèmes.
Du point de vue du droit de la concurrence, il unifie le régime de responsabilité des experts. L'existence de deux régimes distincts suivant que l'activité est exercée ou non dans le cadre des ventes volontaires n'apparaît en effet justifiée par aucun motif d'intérêt général.
Du point de vue de la sécurité juridique des experts, il propose un point de départ fixe à la prescription.
Du point de vue des acheteurs et des vendeurs, il retient un délai de prescription équilibré qui, sans pour autant peser lourdement sur l'activité des experts, est suffisamment long pour être effectivement utile aux personnes recourant aux services d'un expert.
Cet amendement protège les droits des consommateurs, dont j'ai dit tout à l'heure qu'ils étaient un peu les oubliés de cette transposition de la directive. Sur cet aspect très technique des choses, nous rétablirions une égalité de traitement entre deux actes qui, selon qu'ils sont accomplis dans un cadre ou dans un autre, ne répondent pas aux mêmes conditions de délai de prescription. Il y a là une disproportion, une discrimination, qui ne peut pas être acceptée. Tel est le sens de cet amendement.