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Intervention de Monique Boulestin

Réunion du 25 janvier 2011 à 15h00
Ventes de meubles aux enchères publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMonique Boulestin :

Monsieur le rapporteur, j'ai lu votre rapport avec beaucoup d'attention, particulièrement l'introduction où vous exprimez votre souci de préserver « la compétitivité d'une activité importante pour le marché de l'art en France et, plus généralement, pour les consommateurs ». Or, à la suite de mon collègue Jean-Michel Clément, j'observe que les conséquences qu'aurait l'entrée en vigueur de cette proposition de loi ne répondraient pas aux objectifs annoncés.

Ainsi, sans posture particulière, mes remarques se concentreront essentiellement sur le devenir du marché de l'art et des objets de collection.

Vous avez rappelé que le marché de l'art et des objets de collection a longtemps tenu chez nous la première place, avant de la céder, au cours de la seconde moitié du xxe siècle, aux pays anglo-saxons. Cependant, si notre pays n'occupe désormais que la quatrième place du marché mondial des ventes aux enchères, derrière les États-Unis, le Royaume-Uni et la Chine, il convient de rappeler la bonne tenue de l'activité française. En effet, depuis 2002, le montant des ventes volontaires a augmenté de 29,5 %.

Par ailleurs, la proposition de loi que nous étudions aujourd'hui propose d'élargir l'autorisation des ventes de gré à gré. Cette mesure aurait pour effet, en ouvrant totalement les ventes de gré à gré aux sociétés de ventes, de déstabiliser complètement le marché français par un risque de position de quasi-monopole des deux géants internationaux que sont Christie's et Sotheby's, souvent cités ce soir. En effet, ces sociétés internationales ont réalisé 27 % des ventes volontaires aux enchères publiques en France, alors qu'elles ne représentent que 2 % du total des opérateurs implantés dans notre pays. Si, aujourd'hui, nous pouvons parler de position dominante, après le vote de cette loi, nous parlerons de monopole.

À cela s'ajoute la question du maillage territorial, qui assure encore aujourd'hui une régulation et une dynamique du marché de l'art. En effet, les intervenants sur les marchés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques sont nombreux et de statuts très divers, ce qui, loin d'être un handicap, constitue une richesse en termes de compétences et d'emplois.

Je rappelle qu'il existe en France quelque 835 sociétés de ventes volontaires. Je pense également aux antiquaires et marchands d'art, qui ont une réelle compétence et un savoir-faire incontestable.

Grâce à ces différents acteurs répartis sur tout le territoire, nous disposons d'un maillage territorial qui assure le maintien d'une économie locale dont nous avons besoin.

Pour ces raisons concrètes, le risque serait d'aboutir à une perte considérable d'emplois et de compétences, comme ce fut le cas en Angleterre, où 30 % d'antiquaires et de galeristes ont disparu.

Rappelons que, dans le domaine du marché de l'art en France, 15 000 professionnels soutiennent plus de 10 000 emplois et entretiennent des rapports avec 60 000 artisans, ce qui est un gage de qualité pour les consommateurs. C'est pourquoi j'insiste sur la nécessité de conserver et de valoriser notre patrimoine commun au travers du travail et de l'implantation locale de professionnels dotés d'un savoir-faire traditionnel et qui en assurent la transmission auprès des plus jeunes par des formations qualifiantes et diplômantes.

Nous le savons bien, monsieur le ministre, la transposition de la directive Services est inévitable, mais nous savons aussi que le principe de subsidiarité laisse aux États la possibilité, le cas échéant, de l'adapter aux particularités nationales. Il existe une réelle exception française dans le secteur du marché de l'art, que nous devons préserver.

C'est pourquoi, cette proposition de loi mérite une meilleure prise en compte des inquiétudes et des remarques formulées par les différents acteurs du marché de l'art en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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