Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Yves Nicolin

Réunion du 25 janvier 2011 à 15h00
Ventes de meubles aux enchères publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Nicolin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour discuter d'une proposition de loi adoptée par le Sénat voilà plus d'un an. Ce texte de cinquante-deux articles peut paraître technique. En réalité, les enjeux économiques sont de taille : 2 000 personnes travaillent dans le secteur des ventes aux enchères publiques et le montant des adjudications s'élevait à plus de 2,2 milliards d'euros en 2009.

Le champ des ventes aux enchères publiques est très large : il couvre aussi bien les oeuvres d'art que les biens d'équipement, les véhicules d'occasion ou encore les chevaux de course. Les opérateurs français de ventes volontaires aux enchères publiques sont confrontés à d'importantes évolutions, qui tiennent non seulement à la circulation sans cesse plus rapide des biens à vendre, mais également au développement de sites spécialisés sur internet, tel e-Bay. En 2009, le montant des adjudications réalisées sur internet a représenté 5 % du total des ventes volontaires, soit 108 millions d'euros.

Nous avons déjà réformé ce secteur. La loi du 10 juilllet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques a modifié le statut des commissaires-priseurs et a limité leur monopole aux ventes judiciaires. Parallèlement, cette loi offrait aux sociétés de ventes volontaires la possibilité de se développer au niveau international. Cette loi a eu un impact très positif en permettant aux acteurs français de faire face à la concurrence internationale. Toutefois, dix ans après son adoption, le cadre juridique nécessite de nouvelles adaptations. En effet, sans la vente de la collection Saint-Laurent-Bergé, le volume global des adjudications aurait diminué de 5,1 % en 2009. Les opérateurs demeurent éparpillés et de taille modeste. Parallèlement, les acteurs nationaux sont peu présents à l'international tandis que Christie's et Sotheby's réalisent les montants d'adjudication les plus élevés sur notre territoire.

On ne peut que regretter la baisse de rayonnement de la France dans ce domaine. Pour reprendre les termes du Conseil des ventes volontaires dans son rapport de 2007, nous assistons à un « déclin dans l'euphorie ».

Dans ce contexte, il apparaît que notre cadre législatif doit être amélioré. Nous sommes tenus de transposer la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dite Services. Cette transposition nous offre l'opportunité de moderniser ce secteur et d'offrir à nos opérateurs les outils pour faire face à une concurrence internationale de plus en plus forte.

Par ailleurs, je souhaite insister sur le fait que cette réforme est une illustration parfaite de la valorisation du rôle du Parlement résultant de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008. Bien que menée en étroite collaboration avec le Gouvernement, cette réforme d'ampleur est d'origine parlementaire, et nous ne pouvons que nous féliciter de cette coproduction législative.

Le texte adopté par le Sénat va dans le sens d'une libéralisation maîtrisée. Poursuivant l'objectif de libéralisation prôné par la directive Services, les sénateurs ont supprimé l'agrément des opérateurs par le Conseil des ventes volontaires pour lui substituer une déclaration d'activité accompagnée d'un contrôle a posteriori. C'est une bonne chose.

Par ailleurs, les opérateurs pourront exercer sous la forme juridique de leur choix, à titre individuel ou en société civile ou commerciale, et ils pourront pratiquer les ventes de gré à gré, non seulement after sale, comme actuellement, mais aussi à tout moment, sous réserve que le vendeur présente un certain nombre de garanties.

Parallèlement, le texte étend le champ de compétence des opérateurs de ventes volontaires aux enchères publiques aux biens neufs et aux marchandises en gros, le monopole des courtiers de marchandises assermentés se limitant désormais aux seules ventes judiciaires.

La commission des lois a conforté les orientations retenues par les sénateurs tout en améliorant le texte sur plusieurs points. Je souhaite rappeler plusieurs des améliorations proposées par notre commission.

Actuellement, les notaires et les huissiers peuvent procéder à des ventes volontaires aux enchères publiques, mais uniquement à titre accessoire. Le souhait du Sénat de quantifier ce caractère accessoire, par un plafond de son produit financier à 20 % du chiffre annuel brut de leur office, hors ventes volontaires de l'année précédente, a semblé restrictif à notre commission et poser de réelles difficultés. Ces professionnels interviennent le plus souvent pour des ventes de biens spécifiques n'empiétant que de manière marginale sur le marché des autres opérateurs.

En outre, fixer un plafond rigide au caractère accessoire de cette activité aurait pour conséquence de limiter l'objectif de libéralisation des ventes volontaires, objet même de cette proposition de loi.

Pour ces raisons, la suppression du plafond de 20 % du chiffre d'affaires annuel apparaît tout à fait opportune. Il convient d'en rester au droit actuel : le critère du nombre de ventes n'est pas le seul élément à prendre en considération. Par exemple, le temps consacré à chaque activité est l'un des éléments devant entrer en ligne de compte.

En outre, le Sénat avait introduit des obligations de formation des notaires et des huissiers de justice exerçant des activités de ventes aux enchères publiques. Ils devaient justifier d'un diplôme sanctionnant au moins une année d'études supérieures d'histoire de l'art ou d'arts appliqués. La commission des lois est revenue sur les modalités de cette obligation de formation.

Tout d'abord, il a été décidé que ces exigences de formation ne devaient s'appliquer qu'aux nouveaux intervenants et à ceux ayant effectué des ventes aux enchères depuis moins de deux ans, à compter du 1er janvier 2013. Il semblait en effet surprenant d'obliger ceux en exercice, parfois depuis longtemps, à suivre une formation pour continuer à remplir une mission qu'ils exercent actuellement.

Ensuite, il est apparu préférable de renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de définir les conditions de qualifications spécifiques exigées des notaires et des huissiers. Ce décret pourra notamment prévoir l'obligation de suivre une formation délivrée par le Conseil supérieur du notariat ou la Confédération nationale des huissiers de justice, dans le cadre de la formation continue.

La commission des lois a également souhaité tirer les enseignements de l'affaire Drouot. Une information judiciaire pour vols en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de commettre un crime ou délit a été ouverte le 18 mai 2009. L'enquête a donné lieu à l'interpellation de onze personnes, dont huit commissionnaires de l'Union des commissionnaires de l'hôtel des ventes et un commissaire-priseur.

Il est apparu qu'il ne s'agissait pas de quelques vols isolés. Les faits consistaient en la commission, de manière habituelle et organisée, de vols d'objets. L'hôtel des ventes de Drouot joue un rôle majeur pour l'image des ventes aux enchères en France. Ainsi, le législateur se doit d'intervenir pour assainir la situation.

Dans ce cadre, la commission des lois a prévu notamment que les opérateurs de ventes aux enchères publiques communiquent au Conseil des ventes volontaires, lorsqu'il en formule la demande, toutes les précisions utiles concernant leur organisation ou leurs moyens financiers.

Notre commission a également posé le principe selon lequel ces opérateurs devront prendre toutes les dispositions nécessaires à la sécurité des ventes faisant intervenir, pour leur compte, des prestataires de services, ceux-ci ne pouvant ni acheter, ni vendre pour leur compte les biens proposés.

Vous l'aurez compris, la proposition de loi soumise aujourd'hui à notre examen permet de répondre aux difficultés rencontrées par le secteur des ventes aux enchères. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion