Si, pour d'évidentes raisons historiques, les élus communistes ont pour le CEA les yeux de Chimène, ils les gardent néanmoins bien ouverts et s'inquiètent du contexte dans lequel vous évoluez aujourd'hui, qui diffère grandement de celui de la fin des années quarante et des deux décennies suivantes – cela même si le CEA n'est pas le seul grand organisme datant de l'immédiat après-guerre à avoir connu de telles évolutions.
Jusqu'à la fin des années soixante, voire soixante-dix, nul ne doutait d'un secteur nucléaire reposant sur des structures publiques. Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui ont le sentiment que lui aussi est menacé par la recherche du profit, ce qui mine la confiance qu'avait l'opinion du temps où, à l'évidence, l'objectif n'était pas de créer du cash pour l'actionnaire. Le débat sur la filière nucléaire en France tel qu'il est posé depuis quelques mois, notamment dans le rapport Roussely – lequel n'a d'ailleurs fait que mettre noir sur blanc des idées qui avaient cours depuis pas mal de temps – incite à se demander s'il y a un pilote dans l'avion, s'il en faut un, quelle est son identité et qui il transporte. Si, en ce qui nous concerne, nous mettons en avant la maîtrise publique et les pôles publics, est-ce bien cela qui est recherché aujourd'hui ?
Vous avez évoqué la nécessité de renouveler les équipements, ce à quoi nous ne pouvons que souscrire, mais encore faut-il convaincre l'opinion de l'intérêt qu'il y a à poursuivre le travail commencé au siècle dernier. En l'occurrence, une bataille doit être menée pour persuader les sceptiques qui vont jusqu'à remettre en cause l'existence même du CEA.
Par ailleurs, comment envisagez-vous l'articulation de vos travaux avec le projet ITER ?
Où en sont, à Cadarache notamment, les recherches concernant la décontamination des sols ? Je me souviens d'un jardin extraordinaire dont les plantes étaient capables de neutraliser tout ce que le sol avait emmagasiné de déchets industriels abominables !
Enfin, qu'en est-il de votre intérêt pour les énergies renouvelables ? Sans parler des risques géopolitiques pesant notamment sur le trafic par le canal de Suez, il est évident que l'augmentation des prix du pétrole, la diminution des ressources fossiles et la dangerosité de celles que nous exploitons nous obligent à rechercher ailleurs les énergies qui, demain, nous éclaireront, nous chaufferont et nous feront travailler.