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Intervention de Alain Néri

Réunion du 10 juillet 2009 à 15h00
Dérogations au repos dominical — Explications de vote personnelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Néri, président :

La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

-->Mme Marylise Lebranchu. Dans ce texte que l'on nous a présenté longtemps comme revu et corrigé pour qu'il puisse être voté, il reste tout de même une masse d'incertitudes. Je m'adresse en particulier au rapporteur.

S'agissant de ces fameuses zones commerciales exceptionnelles, il se dessine en ce moment, et il le sait, comme beaucoup, un projet, dont je tairai le nom privé, et que j'appellerai « projet de village des marques ». Chacun en connaît la signification. On le sait, en particulier à Troyes. Ce village des marques va sans doute trouver bientôt malheureusement un point d'installation. Nous savons tous comment cela fonctionnera. Ce seront essentiellement des solderies nées dans la grande banlieue new-yorkaise.

Lorsque j'ai eu le grand honneur de travailler avec les PME des productions textiles, cuir et autres métiers, elles m'ont expliqué longuement à quel point il était difficile de résister à la pression des villages des marques qui leur demandaient, lorsqu'elles fabriquaient cent pièces de grande qualité, d'en réserver vingt qui seraient directement et immédiatement soldées dans les villages. Dans cette vallée de Roanne, par exemple, où nous comptons encore quelques beaux fleurons textiles, savoir qu'un nouveau village ouvrira représente une véritable inquiétude pour les producteurs, donc pour les entrepreneurs et leurs salariés, d'ailleurs mieux payés que dans ces commerces, reconnaissons-le.

Quand le village sera installé, sera-t-il une zone exceptionnelle de commerce ? Oui ! C'est exactement la même image que Plan-de-Campagne. De nombreuses marques ouvrent un village qui devient une zone exceptionnelle. J'aurais, en conséquence, voulu, monsieur le ministre – mais je sais que vous ne vous exprimerez plus, vous le ferez donc plus tard – savoir si ce sera vraiment une zone exceptionnelle. C'est, en effet, terrifiant pour les producteurs, les entrepreneurs et pour tous ceux qui travaillent dans les centres-villes et qui, grâce aux marques, tiennent le coup.

Le FISAC, ce fonds qui permet de prélever des taxes sur la grande distribution, quelle qu'en soit la nature, afin de rénover les centres-villes, a aidé, par exemple, la ville de Troyes à retrouver un centre-ville. À quoi servira de continuer à faire du FISAC centre-ville si ces zones, qui deviendront, petit à petit des zones exceptionnelles, continuent à s'installer ? Aujourd'hui, nous tournons une page. On sait ce que signifient marques, qualité, valeur ajoutée par actif, valeur ajoutée dans ces commerces de qualité. On a malheureusement ouvert une brèche en donnant une définition juridique qui permettra ce classement.

On a beaucoup parlé des étudiants et je répète ce que j'ai précédemment expliqué. Il est effectivement anormal d'admettre que certains étudiants sont contraints de travailler tous les week-ends et que d'autres, parce que leurs parents disposent de revenus suffisants, peuvent en profiter pour récupérer et être en pleine forme pour recommencer leurs études le lundi. Nous connaissons les conséquences. Nous savons tous que ces étudiants rencontrent plus de difficultés que les autres, même si nous sommes d'accord pour qu'ils puissent travailler l'été, ce qui ne pose pas de problème. Je parle d'expérience, car je connais un certain nombre de familles qui travaillent dans la grande distribution.

À quoi devons-nous faire face ? Dans ce secteur, vous commencez au SMIC. Quand vous passez chef de ligne, vous gagnez le SMIC plus 40 euros. Lorsque vous devenez chef de rayon, c'est-à-dire l'équivalent d'un responsable de magasin, vous recevez le SMIC plus 50 euros. Dans ce contexte, les enfants ne réussiront pas à suivre correctement des études et prendront le relais le dimanche. Nous traitons, avec ce texte, d'un phénomène de société comme s'il ne s'agissait pas d'un phénomène de civilisation.

Je crois aujourd'hui que la double peine et la double chance sont en train de devenir une habitude dans un pays qui se voulait pourtant moderne en privilégiant égalité et justice. La modernité, c'est cela !

Je terminerai en évoquant de nouveau ces jeunes couples qui vivent dans des communes touristiques, futures zones exceptionnelles de vente. Que va-t-il advenir de leurs enfants ? M. Darcos sait de quoi je parle, car il voulait que les parents les gardent le samedi matin. Or ces jeunes couples considèrent que recourir à une baby-sitter pendant le week-end n'est pas une solution idéale. Ce ne sera donc pas une double, mais une triple peine : une double peine pour les parents qui travailleront le dimanche et une triple peine parce que les enfants paieront la note. C'est impardonnable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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