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Intervention de Julien Dray

Réunion du 1er février 2011 à 15h00
Débat sur la politique de la ville

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dray :

Monsieur le président, monsieur le ministre, à cet instant du débat, qui a commencé il y a près de deux heures, je voudrais vous dire ma frustration totale par rapport à ce que nous sommes en train de faire.

L'intitulé de ce débat laissait attendre un bilan de la politique de la ville. Je suis donc venu pour faire consciencieusement ce bilan, en espérant que nous allions, pour une fois, avoir un débat approfondi, faire un bilan global débouchant sur un jugement qui soit, sinon partagé par tous, en tout cas sérieux. Or, tel n'est pas le cas.

Chacun, et je puis le comprendre, fait part de ses préoccupations personnelles, de ses urgences, qui sont légitimes, de ses interrogations, tout aussi légitimes car la situation actuelle est difficile. Mais je ne crois pas que nous sortirons de ce débat munis d'une vision de la politique de la ville. Nous recevons des réponses, le ministre est courtois et agréable, il nous fournit un certain nombre d'éléments, mais nous sommes très loin de ce qui était prévu initialement. Je ne sais pas comment la conférence des présidents a conçu ce débat, mais ce que nous sommes en train de faire s'apparente à quelque chose qui a existé il y a très longtemps : cela s'appelait les « questions-crible ». C'est une formule comme une autre, mais ce n'est pas le débat annoncé sur le bilan de la politique de la ville. Il serait intéressant de comprendre comment ce détournement s'est produit.

Il est intéressant aussi d'écouter les uns et les autres. Je me faisais, en nous écoutant, la réflexion suivante : imaginons que j'aie invité – ainsi qu'il nous arrive à nous, parlementaires – un certain nombre d'habitants ou de membres d'associations de quartier à ce débat qui les concerne directement. Franchement, je crois qu'ils se seraient sauvés au bout d'un quart d'heure, étant donné la tonalité des échanges : personne ne peut rien y comprendre ! C'est d'ailleurs assez révélateur de la technicisation à laquelle on en est arrivé. Les premiers concernés sont donc totalement exclus de ce débat, et c'est également intéressant en soi, du point de vue de la politique de la ville.

Naturellement, monsieur le ministre, je ne suis pas de ceux qui vont tirer sur la politique de la ville. Un certain nombre d'anciens ministres sont présents aujourd'hui et ils savent que, lorsque j'étais vice-président du conseil régional en charge de ce dossier, nous n'avons pas pratiqué la guerre des classes. Nous avons même contribué, par exemple, à ce que la région Île-de-France soit partie prenante de l'ANRU et mette ce qu'il fallait dans l'enveloppe.

Je ne suis donc pas, cela va de soi, de ceux qui disent que la politique de la ville est un échec. Si échec il y a, c'est celui des politiques économiques et sociales qui conduisent à ce que la politique de la ville, en aval, s'efforce de réparer tout ce qui a échoué.

Je veux également faire observer qu'il n'y a pas une, mais plusieurs politiques de la ville. M. Hamel a raison : il y a de nombreux quartiers, en province, où la politique de la ville a été extrêmement efficace et a donné des résultats tangibles, tant sur le plan du bâti que sur celui du quotidien des populations. C'est incontestable. Mais la politique de la ville concerne à 50 % l'Île-de-France. Et là, ce n'est plus la même chose : beaucoup d'entre nous, qui travaillons sur le sujet, avons l'impression d'une sorte de tonneau des Danaïdes, car on y met de l'argent – là n'est pas la question –, mais rien n'est jamais coordonné et le montant n'est jamais suffisant pour que les dispositifs soient réellement opératoires.

Les maires d'Île-de-France sont épuisés par le marchandage permanent auquel il leur faut se livrer pour essayer d'obtenir le minimum vital.

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