Monsieur le député, vous interrogez le Gouvernement sur la question du versement des prestations liées au handicap et des allocations familiales de salariés, travaillant seuls ou en couple, dans le Grand-Duché de Luxembourg. Vous évoquez également la question de la retraite.
Je vous rappelle que les systèmes de sécurité sociale des États membres de l'Union européenne sont coordonnés par un ensemble de règles qui s'imposent à tous.
Un citoyen européen ne peut relever que d'une seule législation nationale de sécurité sociale. Pour déterminer la législation applicable, le critère habituel est celui du lieu d'exercice de l'activité professionnelle.
Ce principe général est complété, en matière de prestations familiales, par des règles de priorité permettant d'éviter des situations de cumul des prestations familiales qui aboutiraient à des traitements inéquitables entre allocataires.
Il faut donc déterminer quel est l'État compétent pour verser des prestations, dans le cas où une famille est susceptible de se voir ouvrir des droits dans différents pays. Une fois déterminé le pays de rattachement principal, les autres États peuvent, le cas échéant, verser un complément différentiel.
Par exemple, dans le cas qui vous intéresse d'un travailleur exerçant son activité au Grand-Duché de Luxembourg, il a droit pour les membres de sa famille résidant en France aux prestations familiales luxembourgeoises, et ce de façon prioritaire si le conjoint éventuel n'exerce pas d'activité professionnelle en France.
Dans ce cas, les caisses d'allocations familiales peuvent, à titre subsidiaire, verser aux intéressés une allocation différentielle, l'ADI, prévue à l'article L. 512-5 du code de la sécurité sociale. Cette allocation est versée lorsque le montant de l'ensemble des prestations familiales étrangères est inférieur au montant de l'ensemble des prestations familiales françaises auxquelles ces personnes auraient droit si elles travaillaient en France.
L'objectif de cette disposition est donc de garantir un montant total de prestations au moins équivalent à ce que percevrait la famille si l'allocataire travaillait en France et relevait à ce titre, en application des règles européennes, de la législation française de sécurité sociale.
D'autre part, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé est une prestation familiale dont l'objectif principal est de compenser les charges de famille supplémentaires liées à la présence d'un enfant handicapé dans le foyer. L'AEEH est donc nécessairement prise en compte dans la comparaison entre les deux montants globaux de prestations familiales pour calculer l'allocation différentielle éventuellement due par la caisse française, si la prestation versée est inférieure à la prestation prévue en France.
En d'autres termes, l'AEEH ne peut être versée aux intéressés directement et intégralement sur la base de leur seule résidence en France, puisque ces personnes relèvent prioritairement de la législation de sécurité sociale d'un autre État membre.
C'est cette législation étrangère qui doit servir en priorité les prestations familiales ainsi que, le cas échéant, des prestations liées au handicap. En l'occurrence, la législation luxembourgeoise comporte une allocation supplémentaire pour enfant handicapé.
Verser la prestation d'AEEH en tant que telle, sans l'inclure dans le calcul d'ensemble, serait donc contraire à la logique de l'ADI.
Cette logique d'une approche globale de l'ensemble des prestations versées a d'ailleurs été renforcée par le décret du 19 décembre 2008, pris en application de l'article 95 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Ce texte a pour objectif de rétablir l'équité entre les familles travaillant en France et celles travaillant à l'étranger, en évitant que ces dernières puissent cumuler des prestations familiales françaises avec des prestations étrangères.
Afin de rendre plus équitable le dispositif, l'ensemble des prestations familiales françaises sont désormais intégrées dans le calcul de l'ADI et ne sont plus cumulables avec les allocations étrangères.
Enfin, concernant la question de la détermination de l'âge de la retraite dans le cas que vous soulevez, la législation communautaire a bien harmonisé certains principes en matière de retraite, en introduisant notamment un principe de totalisation des périodes d'assurance. En revanche, la détermination de l'âge de la retraite relève de la compétence des États membres.
Dès lors, un assuré qui a accompli une partie de sa carrière dans un autre État membre liquidera les droits acquis dans chaque État en fonction des règles et à l'âge fixé par cet État : il ne serait pas équitable de modifier l'âge de la retraite en France au motif qu'un assuré dispose par ailleurs de droits à retraite à l'étranger.
À l'inverse, on n'imagine pas de relever l'âge de la retraite pour les assurés disposant par ailleurs de droits dans un État membre dont l'âge de la retraite serait plus élevé qu'en France.
Cette réponse un peu complexe avait pour objectif de balayer l'ensemble des questions que vous avez soulevées.