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Intervention de Jean-Claude Fruteau

Réunion du 26 janvier 2011 à 15h00
Lutte contre l'habitat indigne en outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Fruteau :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens, avant toute chose, à remercier et féliciter notre collègue Serge Letchimy pour l'excellent travail qu'il a réalisé. Le sujet qui nous occupe aujourd'hui concerne l'ensemble des départements et territoires d'outre-mer et marque les limites du principe d'égalité dans notre République. La proposition de loi soumise à notre examen, qui s'appuie sur les constats et les recommandations du rapport sur la résorption de l'habitat insalubre et indigne, constitue un enjeu majeur pour nos territoires puisque, en 2011, dans un pays industrialisé comme la France, cinquième puissance mondiale, des citoyens français vivent encore dans des bidonvilles et payent même parfois – ce qui est un comble ! – des impôts pour ces constructions indécentes.

En dépit des moyens financiers mis en oeuvre depuis plus de trente ans et des dispositifs juridiques en vigueur, force est de constater que, loin de régresser, l'habitat indigne dans les départements d'outre-mer a, au mieux, stagné et, au pire, progressé.

Cette réalité est révélatrice de la détresse sociale que connaissent bon nombre de nos concitoyens. Je ne suis guère confiant dans l'avenir au vu de la situation de décrochage économique et social que vivent nos départements.

En Réunion, par exemple, le chômage a connu, en vingt et un mois, une augmentation de près de 35 % et le niveau de vie médian représente, selon l'INSEE, seulement 62 % de celui des Français – et ce pourcentage tombe à 44 % quand on prend pour assiette de la comparaison la moitié la plus modeste de la population !

Par ailleurs, on ne peut guère compter sur les effets de la LODEOM ou sur une éventuelle application des mesures annoncées par le Comité interministériel de l'outre-mer pour espérer réduire ces scandaleuses inégalités.

Dans un tel contexte, on comprend mieux l'émotion suscitée par les propos du Président de la République dans ses voeux à l'outre-mer lorsqu'il nous a exhortés à sortir de l'assistance. Pour ma part – je le dis fermement –, là où le Président de la République voit de l'assistance, je vois une nécessaire remise à niveau pour combler les retards accumulés. Sans ce rattrapage, en effet, comment pourrions-nous surmonter la crise structurelle du logement dans nos territoires ?

Cette remise à niveau exige des moyens nouveaux, exceptionnels et originaux. Si la situation a pu perdurer, c'est par manque non seulement de moyens financiers, mais aussi d'outils juridiques aptes à permettre le traitement de ce problème : ceux qui existent actuellement ne sont pas suffisants ou ne sont pas adaptés à la situation de nos régions. Dans la configuration juridique actuelle, le droit à un logement décent devient un objectif quasi inaccessible et le droit au logement opposable, voté par la majorité sous la précédente législature, déjà très complexe à appliquer en France hexagonale, n'est plus qu'un droit virtuel dans nos territoires.

La proposition de loi soumise aujourd'hui à notre assemblée est cruciale. Elle propose une multitude de moyens à mettre en oeuvre, dans des conditions bien déterminées, qui ont été évoqués par les orateurs qui se sont exprimés avant moi à cette tribune.

Il me paraît essentiel de pouvoir trouver une solution, sous une forme ou sous une autre, pour l'indemnisation des propriétaires des constructions que l'on désigne à La Réunion par les termes de « bois sous tôles » suite à une opération publique ou privée réalisée sur le terrain occupé. En effet, les personnes qui vivent dans ces habitations n'ont qu'un patrimoine très modeste et même, dans de nombreux cas, n'ont aucun patrimoine. Dès lors, cette construction de bric et de broc constitue l'unique bien matériel qu'ils possèdent et représente toujours l'effort de toute une vie.

Cette proposition de loi nous donne les moyens de commencer à changer les choses. Il nous appartient, à nous parlementaires, de prendre nos responsabilités face aux défis majeurs que nous avons à relever. Les mêmes constats sont faits sur tous les bancs de notre assemblée, sans considération partisane.

Il reste à espérer que le sentiment unanime qui nous anime se traduira dans les votes et que les propositions contenues dans ce texte, qui semblent recueillir l'assentiment du Gouvernement, feront rapidement l'objet de textes d'application.

En visite en Guyane en juillet dernier, madame la ministre, votre collègue Benoist Apparu s'est déclaré scandalisé par les conditions de vie des personnes vivant dans des poches d'habitats insalubres à Cayenne. Selon ses propres termes, « ces gens vivent dans des conditions indécentes dans une République comme la nôtre ».

Je forme le voeu que la représentation nationale et le Gouvernement ne laissent pas passer l'occasion qui nous est offerte de contribuer à mettre fin à ce scandale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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