J'ai déjà eu le plaisir de vous auditionner, monsieur Moisan, et je connais vos arguments.
Cela dit, on ne peut pas considérer qu'il faut forcément faire chez nous ce qui, de toute façon, peut se faire ailleurs – ou alors, ne nous donnons pas la peine d'écrire des lois françaises de bioéthique.
Par ailleurs, la question relève bien de la bioéthique : elle touche bien sûr à la biologie, mais aussi à l'éthique, puisque vous avez vous-même souligné que certains laboratoires ne la respectaient pas. L'éthique entre en ligne de compte, et pas seulement pour ce qui est de la fiabilité de la pratique mais aussi d'un point de vue sociétal. La bioéthique est intrinsèque à la société : nous trouvons normal que nos lois de bioéthique parlent des mères porteuses, alors qu'il s'agit plus d'un phénomène de société que d'une découverte scientifique.
Enfin, il ne s'agit pas de savoir qui est fidèle ou infidèle, mais ce que recouvre réellement la recherche génétique en paternité. L'enfant qui a été élevé par un père et une mère n'est-il plus leur enfant s'il est démontré que l'un n'est pas son géniteur ? Je crois qu'il l'est toujours.
Notre droit, notre République sont fondés sur le droit du sol, l'éducation et le transfert humain, pas sur le génétique ou le transfert de la race.
Si les gens passent pas Internet pour faire réaliser des tests de paternité, nous devons les avertir à la fois du manque de fiabilité de ces tests et de leur inutilité politique et philosophique. Mais les autoriser sur le territoire français serait un signal fort en faveur de l'importance du facteur génétique. Par effet de dominos, la possibilité deviendrait vite un droit : pourquoi tous les nouveaux-nés n'auraient-ils pas droit à un test de paternité, pour que leur authenticité génétique puisse être avérée ? Je ne pense pas que ce soit conforme à l'esprit du droit français et c'est pourquoi je n'y suis pas favorable. Ce qui ne m'empêche pas de reconnaître l'extrême qualité de votre travail scientifique ainsi que l'intérêt de disposer de tests fiables lorsque la justice en a besoin.