J'ai d'ailleurs le sentiment que cet amendement a été concocté subrepticement – M. le ministre répondra certainement sur ce point – et que l'ARCEP n'a pas été consultée. Loin de renforcer le dialogue, cet amendement est plutôt de nature à poser des problèmes.
En outre, nous nous interrogeons sur la nature de cet amendement. Est-il véritablement à sa place dans ce texte ? La question se pose : il s'agit d'un texte de transposition, et l'on pourrait considérer cet amendement comme un cavalier, dans la mesure où la directive ne formule aucune préconisation particulière sur ce point. Je dirai même qu'elle préconise une disposition contraire à cet amendement.
Ainsi, madame de La Raudière, dans votre rapport, à la page 26, vous écrivez que cette directive, dite « paquet télécoms », a pour but le renforcement du régulateur – c'est le point D –, et que, à cette fin, la première disposition de la directive prescrit une indépendance accrue.
De fait, en lisant la directive, on a le sentiment que l'amendement qui nous est soumis lui est entièrement opposé. Selon la directive, en effet, « il convient de renforcer l'indépendance des autorités réglementaires nationales afin d'assurer une application plus efficace du cadre réglementaire et d'accroître leur autorité et la prévisibilité de leurs décisions. À cet effet, il y a lieu de prévoir, en droit national, une disposition expresse garantissant que, dans l'exercice de ses fonctions, une autorité réglementaire nationale responsable de la régulation du marché ex ante ou du règlement des litiges entre entreprises est à l'abri de toute intervention extérieure ou pression politique susceptible de compromettre son impartialité dans l'appréciation des questions qui lui sont soumises ».
Ce que vous proposez par voie d'amendement est donc manifestement contraire à la directive. C'est du reste sans doute pour cette raison que la Commission vient, par un communiqué, d'exprimer de très fortes réserves à propos de votre initiative, monsieur le ministre.
Ainsi, la Commission européenne va examiner « de très près » le projet français visant à nommer un commissaire du gouvernement au sein de l'autorité nationale de régulation des télécoms, car elle veut s'assurer de l'indépendance de cet organisme, a indiqué aujourd'hui même l'un de ses porte-parole.
« Nous allons vérifier de très près la conformité de ce projet avec la réglementation européenne », a déclaré Jonathan Todd, porte-parole de la Commission en matière de télécommunications. « Nous veillerons en particulier à ce que le dialogue entre l'ARCEP et les administrations de l'État ne compromette pas l'indépendance et l'impartialité du régulateur », a-t-il ajouté, notant par ailleurs – mais nous en débattrons – que « l'État français est un actionnaire important dans l'opérateur historique en France », si bien qu'« une séparation structurelle effective entre la fonction de réglementation et les activités inhérentes à la propriété » est nécessaire.