Au nom de mon groupe, je félicite vivement notre rapporteur pour le travail remarquable qu'il a accompli. Nous avions besoin d'une matière précise pour appréhender la réalité du logement insalubre, et son rapport de 2009 nous l'a donnée. Je lui suis aussi reconnaissant d'aborder un problème dont nous n'avons pu nous dépêtrer depuis des décennies. En effet, bien que chaque texte concernant l'habitat soit l'occasion de s'interroger sur le caractère complexe de l'application des dispositions d'urbanisme dans les départements et régions d'outre-mer, nous n'avons jamais pu régler le problème.
Dans le même temps, nous voyons se réduire l'impact des usages et coutumes sur notre droit positif. Avant la deuxième guerre mondiale, la jurisprudence avait encore recours aux usages pour régler les conflits, mais aujourd'hui, il est devenu pratiquement impossible de les invoquer. Dès lors, j'ai pu avoir, à titre professionnel, l'expérience de règlements de succession inextricables – à Basse-Terre, par exemple –, dans lesquelles seuls des instruments exorbitants du droit commun auraient pu garantir les droits d'ayants droit de la sixième génération. À cet égard, le problème constitutionnel auquel est confronté ce texte est révélateur : l'instrument constitutionnel ne permet pas de traduire certaines particularités de notre territoire.
L'approche du rapporteur nous a donc paru, à moi et à mon groupe, la meilleure possible : elle consiste à prendre en compte en tant que telle une réalité d'usage, qui s'impose dans les faits, après avoir tenté pendant des décennies de la revisiter à travers des règles de droit d'origine romaine telles que la prescription acquisitive ou l'usucapion. Il ne servirait à rien, en effet, d'affirmer que cette réalité ne correspond pas aux enjeux constitutionnels. Nous devons construire une solution, mettre les bons mots au bon endroit. La Chancellerie aurait d'ailleurs pu se réveiller plus tôt, car cela représente un travail de longue haleine. Mais en tout état de cause, la réalité doit s'imposer au législateur.
Nous devons donc avancer, et ne pas faiblir, d'autant qu'il y a unanimité sur l'objectif et que les dispositions de la proposition de loi représentent la meilleure stratégie pour l'atteindre. L'ensemble des dix-huit articles visite les bonnes questions – y compris pour ce qui concerne Mayotte. Si la Chancellerie souhaite en remettre en cause certains aspects, elle doit alors apporter ses propres solutions.
La proposition de loi porte une triple stratégie. En matière d'aménagement du territoire, tout d'abord ; quand on visite les départements et régions concernés, on voit bien que les opérations sont bloquées depuis des années. Certains accuseront l'État, d'autres les élus locaux, le manque de moyens ou les organismes HLM ; mais on sait que la réalité n'est pas celle-là.
La deuxième concerne l'équité territoriale. Si les instruments que donne la République aux actions de développement n'ont pas les mêmes effets partout, il faut les corriger.
Enfin, la troisième est une stratégie de justice sociale. On ne peut, en effet, parler de progrès dans ces territoires sans que les instruments de leur développement soient rendus concrètement disponibles.
C'est pourquoi le groupe socialiste soutient fermement ce projet, et souhaite que la Commission continue à jouer son rôle en invitant ceux qui mettent en avant d'éventuels risques à proposer les solutions destinées à les éviter.