On a cru, sans doute par contagion sémantique, que le défenseur des droits pouvait aussi remplir les fonctions de défenseur des enfants. Or – j'y reviendrai à travers un amendement – la défense des enfants et la défense des droits, ce n'est pas la même chose. La loi de 2000, votée ici à l'unanimité, n'a pas institué un défenseur des droits des enfants mais bien un défenseur des enfants. L'enfant n'est pas un adulte en miniature dont il s'agirait de défendre les droits. La loi prévoit en effet que le défenseur des enfants s'occupe de l'intérêt de cette fragile personne en formation.
Renoncer à donner au défenseur des enfants son indépendance et la plénitude de son action menace cette fonction, la rend secondaire. La France est le pays européen où le plus grand nombre d'enfants sont placés en institutions ou en familles d'accueil. C'est un grand souci : quand on place un enfant, il ne s'agit pas de son droit. Bien sûr, un placement se décide dans le cadre de la loi ; mais ce qu'on doit prendre en compte est autrement plus large et plus subtil. C'est de la formation de la personnalité qu'il s'agit. Les conséquences sur le cercle familial, ou ce qu'il en reste, relèvent de l'intuitif, de l'affectif. De telles décisions ne peuvent relever que d'une autorité distincte du défenseur des droits.
Voilà pourquoi, selon moi, le défenseur des enfants doit garder son autonomie, sa pleine indépendance même, pour disposer de toute son autorité et user pleinement de la responsabilité dont la loi l'a chargé.