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Intervention de René Dosière

Réunion du 11 janvier 2011 à 15h00
Hommage de l'assemblée — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Dosière :

Enfin, le nombre d'autorités administratives indépendantes ayant tendance à croître au fil du temps, il arrive que certaines compétences se recoupent. Il nous est donc apparu qu'il pouvait être procédé à un certain nombre de regroupements, pas seulement pour des raisons financières – l'un des regroupements ayant d'ailleurs abouti à des dépenses supplémentaires –, mais aussi parce que le citoyen peut trouver avantage, en termes de lisibilité et de masse critique, à avoir affaire à des entités moins nombreuses et plus importantes.

Notre rapport contient une proposition centrale, consistant à renforcer l'autorité et l'indépendance des autorités administratives indépendantes, tout spécialement celles concernant les libertés publiques, par l'élection des responsables de ces autorités à une majorité positive et qualifiée du Parlement : les commissions compétentes du Parlement désigneraient les responsables à la majorité des trois cinquièmes.

Cette solution présente plusieurs avantages. Premièrement, l'obtention d'une majorité des trois cinquièmes suppose un accord entre la majorité et l'opposition, donc le choix d'une personnalité incontestable, à l'autorité morale reconnue. C'est ainsi que les choses se passent dans les démocraties avancées où nous nous sommes rendus en mission, c'est-à-dire en Suède, dans la province du Québec et, au niveau fédéral, au Canada. En matière de libertés publiques, ce type de choix est fondamental, car il évite que ne prévale un point de vue partisan.

Deuxièmement, là où il est mis en oeuvre, ce mode de nomination fonctionne de manière parfaite : dès lors que la majorité et l'opposition se sont mises d'accord, c'est toujours à l'unanimité que les responsables sont désignés.

Troisièmement, cette solution présente l'intérêt de respecter l'intention fondamentale de la réforme constitutionnelle, consistant à revaloriser le rôle du Parlement. Pour cela, peut-on mieux faire que de donner au Parlement le pouvoir de nommer les responsables des autorités qui, sans cela, auraient tendance à vouloir prendre le pouvoir eux-mêmes ?

La proposition que Christian Vanneste et moi-même avons présentée devant le comité d'évaluation et de contrôle n'a suscité aucune réaction négative : personne ne nous a dit qu'il s'agissait là d'une proposition iconoclaste ! Notre rapport, intitulé : « Garantir l'indépendance des autorités administratives indépendantes sous la protection du Parlement », n'a soulevé aucune objection de la part de ce comité, pas plus que de la part de la commission des lois, où nous avons renouvelé notre présentation à la demande de son président. J'insiste sur ce point : personne n'a jamais laissé entendre qu'il valait mieux laisser à l'exécutif le soin de nommer les responsables des autorités administratives indépendantes.

Sans prétendre à la qualité d'experts du simple fait d'avoir rédigé ce rapport, nous avons cependant acquis quelques connaissances durant l'année de travail que cela nous a demandé, ce qui nous permet de porter une appréciation sur le texte qui nous est aujourd'hui soumis. Ce texte a-t-il pour objet de regrouper des autorités administratives indépendantes ? Oui, et nous n'y sommes pas hostiles, puisque nous l'avons proposé. Cela étant, nous l'avons proposé dans le but de renforcer la notoriété des autorités concernées, afin que le citoyen soit mieux à même de les identifier, donc que ses droits soient mieux protégés. Or, ce n'est pas vraiment ce qui nous est proposé avec ce texte !

Sur le périmètre, d'abord, nous étions opposés à l'absorption de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, investie de missions bien spécifiques, parmi lesquelles ne figure pas la médiation. Nous proposions donc que la CNDS soit regroupée avec le Contrôleur des lieux de privation de liberté, compte tenu de leurs affinités en termes de compétences. Pour éviter de « casser » le travail de ces deux petites instances, récemment mises en place, nous proposions que leur regroupement n'intervienne que beaucoup plus tard – à l'issue de l'actuel mandat du CGLPL – et que dans l'immédiat, la CNDS reste indépendante et continue, avec les très faibles moyens qui lui sont alloués – huit personnes et un budget de l'ordre de 700 000 euros – son excellent travail, fondamental dans notre démocratie. Seule une commission indépendante peut garantir le respect des règles de déontologie par la police – et si l'on veut que la police soit respectée, il faut qu'elle soit respectable.

Or, ce qui nous est proposé consiste en une absorption pure et simple de la CNDS par un vaste ensemble. Que va devenir cette autorité, avec les faibles moyens qui sont les siens, lorsqu'elle sera intégrée à une nouvelle entité composée de deux cents ou deux cent cinquante personnes et disposant d'un budget de 20 à 25 millions d'euros de budget ?

Je souligne par ailleurs que la CNDS est également compétente en matière de déontologie des polices privées, ce que l'on ignore souvent. Un reportage télévisé récemment diffusé montrait qu'en ce domaine, de nombreuses améliorations restaient à réaliser.

Notre deuxième motif de désaccord au sujet de ce texte porte sur le fonctionnement de la nouvelle autorité créée. Celle-ci sera dirigée par un seul patron, le Défenseur des droits – assisté, comme nous l'a précisé le garde des sceaux en commission, par des collaborateurs. Ces collaborateurs – un terme empreint d'une certaine connotation…

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