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Intervention de Noël Mamère

Réunion du 11 janvier 2011 à 15h00
Hommage de l'assemblée — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Le projet de loi contient des dispositions qui conduisent à croire que ce qui a été fait par la HALDE depuis cinq ans ne sera pas, loin de là, poursuivi par le Défenseur des droits. Ainsi, ce dernier, nommé par le Président de la République, sera seul doté du pouvoir de décision ; il pourra décider en opportunité, sans que ses décisions puissent être contestées et, dans le même temps, il pourra opérer un tri selon les dossiers ou les critères discriminatoires en jeu. Il pourra librement opter pour la médiation dans le règlement des litiges, sans dire le droit.

Non seulement la saisine du collège par le Défenseur des droits sera facultative, mais l'avis rendu ne sera que consultatif. La prise de décision collégiale est donc remise en cause. La société civile disparaît purement et simplement du paysage puisque, en l'état, le texte n'a pas prévu de créer un comité consultatif susceptible de faire le lien entre l'institution et les organisations et associations, riches de leurs expériences de terrain.

À ces règles de fonctionnement qui, du reste, interrogent la compatibilité du texte avec le droit communautaire, mais aussi avec la Constitution, se mêle un contexte politique de dénigrement du travail mené par la HALDE, qui a pourtant été saisie de 12 000 réclamations en 2010.

Les autorités indépendantes dont nous parlons, en particulier la CNDS et le Défenseur des enfants, vont donc perdre une grande part de leur lisibilité pour les citoyens. Comme le rappelle Mme Dominique Versini : « La lisibilité du Défenseur des droits sera réduite pour les enfants alors qu'ils peuvent s'adresser aujourd'hui en direct, ainsi que leurs parents, les professionnels de l'enfance ou encore les associations, à un Défenseur des enfants clairement identifié comme étant en charge de défendre et promouvoir tous leurs droits. »

Le mode de désignation est également problématique. Il n'y aura qu'un Défenseur des droits nommé par le Président de la République qui aura le dernier mot, même si celui-ci ne peut procéder à une nomination lorsque les trois cinquièmes de l'Assemblée et du Sénat s'y opposent. On retrouve la logique qui fut appliquée au CSA : au prétexte qu'il n'aurait pas été indépendant, on a supprimé son pouvoir de nomination.

Toutes ces institutions, constituant un outil très important pour la protection des droits et des libertés, sont intégrées dans un grand Défenseur des droits qui n'aura absolument plus les mêmes pouvoirs et qui, ayant été nommé par le Président de la République, se trouvera dans une relation de dépendance directe. À nouveau, la situation est comparable à celle de l'audiovisuel public, puisque ce dernier nomme et révoque les responsables de ce secteur selon son bon plaisir. Voyez jusqu'où va la soumission d'un certain nombre d'outils démocratiques au pouvoir actuel !

La collégialité, qui a cours à la fois à la HALDE et à la CNDS, ne sera plus de mise. La création proposée correspond à celle d'une très grande entité : le Défenseur se trouve au sommet d'une structure pyramidale, puisqu'il nomme des adjoints et préside des collèges consultatifs. Une telle organisation aura, à l'évidence, les conséquences que chacun peut imaginer. Au sein de cette structure pyramidale seront réunies des missions tout à fait différentes, voire hétérogènes et contradictoires. Je le répète : on ne peut comparer la fonction de médiation et celle de contrôle.

En outre, une telle organisation a fatalement pour conséquence une dilution des responsabilités. Conflits de compétences, conflits de personnes, conflits d'autorités inévitables dans les grandes structures bureaucratiques seront le lot du futur organisme. Loin d'être un outil efficace, c'est donc un mastodonte bureaucratique lesté de toutes les pesanteurs inhérentes à ce type d'administration qui va naître.

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