Et le risque, demain, d'une colère des Français menace tous les républicains attachés aux valeurs de notre pays. Pour conjurer ce danger, il nous faudra plus que des exhortations et des coups de menton.
Le projet de loi LOPPSI 2 nous offre-t-il l'occasion d'un sursaut ? Non. Il condense, au contraire, tous les défauts de la politique conduite depuis 2002.
Sa forme même trahit la fièvre législative de la majorité : comptant quarante-six articles lors de sa présentation au conseil des ministres, le projet en rassemble aujourd'hui près du quadruple. Rien ne semble pouvoir arrêter la fuite en avant dans l'affichage !
Le fond témoigne également de cette surenchère : vous vous trompez, vous persistez et signez. Présenté par ses auteurs comme une boîte à outils, le texte tient plutôt d'un sac d'aspirateur. Les dispositions les plus diverses – certaines utiles bien sûr – y sont rassemblées, pêle-mêle, sans cohérence et sans ligne directrice.
La LOPPSI 2 n'est pas une loi de programmation. Les rares indications budgétaires sont renvoyées à des annexes dont chacun sait qu'elles n'ont aucune valeur normative. L'application aveugle de la RGPP reste la priorité insensée. Alors que les manques d'effectifs sont criants, 7 000 postes de policiers et de gendarmes devraient encore être supprimés d'ici à 2011 !
Pour pallier ces restrictions, le législateur est donc prié d'imaginer des pis-aller. Précieuse dans certaines circonstances – nous la mettons en oeuvre dans de nombreuses villes –, la vidéoprotection est présentée comme la panacée. Dangereuse par ses conséquences, la sous-traitance de la sécurité est généralisée au profit des sociétés privées. Inacceptable dans son principe, la mise sous tutelle des forces municipales franchit un nouveau cap avec le conditionnement des subventions du Fonds interministériel de prévention de la délinquance : une nouvelle fois, vous vous défaussez sur les élus locaux.
Au lieu d'inventer ce genre de rustines, la LOPPSI 2 devrait, au minimum, maintenir à 200 000 le nombre total de policiers et de gendarmes.
La LOPPSI 2, et c'est encore plus grave, n'est pas une loi d'orientation. Annoncé dès le début du quinquennat, ce projet, sans cesse promis et toujours retardé, aura mis plus de trois ans à aboutir. Cette genèse laborieuse révèle mieux que tout l'absence de stratégie claire sur le déploiement, l'usage, les missions des forces de l'ordre. Et c'est cela le plus grave, monsieur le ministre.
Mise en place par la gauche, la police de proximité fut d'abord l'objet de sarcasmes. Une fois que l'on eut bien ri, on constata cependant que l'idée n'était pas si mauvaise ; elle était même attendue, voire plébiscitée par nos concitoyens. On tâcha alors de la rétablir, sous une appellation nouvelle. Quelques « unités territoriales de quartier » virent ainsi le jour. C'était pourtant déjà trop : le pouvoir ne pouvait si clairement se déjuger. À peine nées, les UTEQ furent défaites à leur tour. On parle désormais de « brigades spéciales » sans que personne ne comprenne bien les principes de leur fonctionnement et les contours de leurs missions.
Comme en témoigne la disposition sur l'interdiction du territoire, le seul horizon de la majorité est désormais celui de la surenchère répressive. Née en 2002 de la volonté d'enrayer la montée de l'extrême-droite, la politique de la majorité est aujourd'hui contaminée par les thèses de celle-ci. Beaucoup, dans vos rangs, vous le reprochent désormais ouvertement.
Cette dérive suffit à signer votre échec.
Pour l'ensemble de ces raisons, et parce que cette politique ne correspond pas à l'attente de nos concitoyens, les députés du groupe SRC voteront contre le projet de loi LOPPSI 2. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)