Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du 20 décembre 2010 à 16h00
Adaptation de la législation au droit de l'union européenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous examinons est issu d'une proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit communautaire, déposée le 6 septembre 2010 sur le bureau du Sénat par MM. Gérard Longuet, Jean Bizet et Jean-Paul Emorine. Il vise à transposer diverses directives et règlements européens dans la législation nationale. Par cette proposition de loi, le Parlement se saisit lui-même de la question du retard de transposition des textes européens. Comme l'indique Martial Saddier dans son rapport : « C'est donc dans le constat des conséquences dommageables d'un retard de transposition que ce texte-catalogue trouve sa principale justification, à défaut d'une véritable cohérence d'ensemble. » Nous partageons totalement cette analyse.

Cette proposition de loi « catalogue » suscite, pour le moins, sur la forme et sur le fond plusieurs critiques.

S'agissant de l'initiative parlementaire, nous devrions avant tout saluer la vigilance de nos collègues sénateurs, qui les a conduits à déposer cette proposition de loi afin de prévenir une sanction à l'encontre de la France dans le cadre d'une procédure en manquement initiée par la Commission européenne. Cette rigueur les honore, d'autant que l'on se trouve confronté à une détérioration du déficit français de transposition : en mars 2010, la France affichait un déficit de transposition de dix directives. Cela étant, nous déplorons que l'initiative parlementaire ait dû se substituer au Gouvernement.

Le Gouvernement est-il si négligent que l'accumulation des retards de transposition, tous secteurs confondus, l'a conduit à laisser aux membres de sa majorité le soin de présenter une proposition de loi « fourre-tout » pour transposer ces textes européens en droit français ? Le retard a déjà fait des victimes collatérales, notamment dans le domaine de l'urbanisme. L'amendement de mon collègue havrais Daniel Fidelin illustre les difficultés qui se manifestent sur le terrain : je pense notamment à la situation du SCOT – schéma de cohérence territoriale – de l'agglomération havraise.

Les auteurs de la proposition justifient que l'initiative parlementaire en vienne à se substituer à celle du Gouvernement faute de véhicule législatif adéquat. En réalité, cela résulte du fait que le Gouvernement a traditionnellement recours à la transposition sectorielle. Or cette méthode, pour le moins discutable, de morcellement de la transposition des directives laisse à l'écart nombre de dispositions très spécifiques. Il faut ensuite avoir recours à des lois « fourre-tout » ou qui s'apparentent à des catalogues pour finaliser les transpositions. La proposition de loi soumise aujourd'hui à notre approbation en est une parfaite illustration.

Dans l'urgence, elle compile « diverses dispositions » – c'est un euphémisme – d'adaptation de la législation au droit communautaire sans aucun souci de cohérence, et demande aux parlementaires de se prononcer, également dans l'urgence, sur ce patchwork de dispositions.

Cette méthode n'est pas satisfaisante, elle ne permet pas aux parlementaires et, surtout, aux citoyens d'avoir une vision globale des directives, donc d'en saisir pleinement les enjeux et de comprendre le fonctionnement de l'Europe.

À cet égard, je déplore à nouveau que le gouvernement français ait renoncé à ce qu'il avait initialement envisagé de faire : déposer un projet de loi-cadre pour transposer la très célèbre directive « services ». Sur ce point, la France s'est distinguée des autres États membres, qui ont opté quant à eux pour une loi-cadre de transposition. Nous déplorons, je le répète, que le Gouvernement n'ait pas choisi de transposer de la même manière une directive qui livre bon nombre de services aux règles de la concurrence sauvage, et qu'il ait préféré la voie sectorielle, voire, dans certains domaines, la voie réglementaire.

Non seulement la transposition, qui aurait dû être achevée le 29 décembre 2009, ne l'est toujours pas – en attestent les dispositions transposées aux articles 3 et 4 de la présente proposition de loi –, mais, surtout, le Parlement a été privé d'un débat. Pour justifier son choix, le Gouvernement a argué qu'une loi-cadre de transposition aurait pu servir d'« épouvantail » à tous ceux qui auraient été tentés d'instrumentaliser un exercice essentiellement technique à des fins électorales. Mais cela s'appelle la démocratie, monsieur le secrétaire d'État !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion