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Intervention de Éric Besson

Réunion du 16 décembre 2010 à 10h00
Commission des affaires économiques

Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique :

M. Brottes et plusieurs autres députés se sont inquiétés de la diminution des pouvoirs des ministres. Il s'agit là d'une discussion générale, qui dépasse largement le cadre de l'ordonnance dont il est aujourd'hui question. En économie de marché régulée et dans le processus de construction européenne que, par vagues successives, nous avons accepté, voulu ou souhaité – je vous laisse le choix du mot –, des autorités indépendantes de plus en plus nombreuses sont créées et se trouvent dotées d'un pouvoir croissant que certains croient voir s'exercer au détriment de celui des ministres compétents.

À l'inverse, il semblerait, malgré les remarques justifiées de Jean-Claude Lenoir, que la France soit le pays qui cherche à laisser au Gouvernement les marges de manoeuvre les plus importantes, en ménageant, y compris avec ce texte, une négociation permanente avec la Commission européenne. Ainsi, la possibilité de demander une seconde délibération tient au fait que la Commission considère que le pré-projet d'ordonnance ne respecte pas la directive. Cette dialectique permanente est indispensable. Dans le même temps, le Gouvernement maintient un contrôle tout au long du processus de détermination des tarifs d'infrastructures.

Pour ce qui concerne le raccordement, la question économique de savoir comment déterminer la part relative du distributeur et du raccordé relève effectivement de la CRE. De fait, les règles actuelles ne sont pas toujours claires, notamment à propos du gaz.

Monsieur Brottes, si l'ordonnance ne cite que le ministre chargé de l'énergie, c'est parce qu'un texte législatif doit être valide quelle que soit l'architecture de l'organisation gouvernementale. Il revient ensuite aux décrets d'application de préciser les responsabilités respectives des différents acteurs – en l'espèce, par exemple, de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, qui aura bien vocation à participer aux décisions dans les domaines prévus par ces décrets d'application.

Le principe de péréquation reste établi et les contrats de service public seront maintenus. Le travail sur ce point est engagé avec RTE, ERDF et EDF et nous travaillons notamment avec EDF sur un contrat de service public pour les cinq prochaines années, lequel prend en compte les questions classiquement envisagées par de tels contrats.

En matière d'investissements, les programmations pluriannuelles des investissements, ou PPI, sont maintenues – nous les avons évoquées lors du débat sur la loi NOME. Le fait que les autres pays européens engagent également des programmes d'investissement est un progrès.

Le Médiateur, même s'il n'est pas directement mentionné dans l'ordonnance – il n'est d'ailleurs pas certain qu'il dût l'être – est maintenu et son rôle reste important. Il doit d'ailleurs me remettre aujourd'hui même, à l'issue de cette réunion, un rapport qui sera rendu public cet après-midi.

Quant au déontologue, ce « salarié magique » qu'évoquait M. Brottes, il est vrai que son statut relève d'une sorte de quadrature du cercle. Il peut être salarié du transporteur, mais il sera protégé par des règles spécifiques, avec l'aide de la CRE. L'entreprise peut également confier ce rôle à un médiateur. Nous expliciterons davantage ce point dans le cadre du groupe de travail.

Le texte n'a pas d'impact sur la distribution : le rapport entre l'autorité concédante et le concessionnaire est maintenu et les prérogatives de chacun ne sont pas modifiées.

Pour ce qui concerne les salariés, vous soulignez à juste titre que les règles de cession des actions détenues dans la maison-mère sont strictement encadrées : les actions acquises sont gardées et il n'y aura pas de nouvelles actions – sauf peut-être, sous réserve des conclusions de l'analyse juridique en cours, pour les tout petits portefeuilles.

Je vous remettrai, monsieur le président, une réponse détaillée relative à la position du Gouvernement sur la volonté d'EDF d'affecter partiellement RTE à ses actifs dédiés. Je précise dès maintenant que les fonds seront utilisés vers 2030-2040 et que cette question est donc sans lien avec les directives dont il est aujourd'hui question.

Monsieur Brottes, je tiens à réaffirmer que le texte qui vous est soumis ne remet nullement en cause un dispositif existant qui fonctionne – par exemple pour ce qui concerne la distribution, le Médiateur de l'énergie ou les PPI. Vous devriez être rassuré rapidement lors des discussions plus approfondies que nous aurons au sein du groupe de travail.

Monsieur Lenoir, je vous remercie de votre contribution et du rappel que vous avez fait d'événements auxquels vous avez été personnellement associé. Comme vous l'avez indiqué, ces textes ne constituent pas pour la France une rupture, mais une continuité. Il est également vrai que, si la France est parfois concernée, voire visée, ce n'est pas ici le cas. Comme vous l'avez rappelé, les débats ont été très passionnés et, n'y ayant pas personnellement participé, je puis rendre hommage à ceux qui l'ont fait.

Si le ministre peut aujourd'hui approuver formellement le TURPE, il n'a pas la possibilité de le modifier, mais seulement de demander à la CRE de le réviser. La situation ne sera guère différente demain, car le ministre ne pourra demander qu'une seconde délibération. C'est là qu'intervient la négociation avec la Commission.

Nous pourrons revenir plus précisément dans le cadre du groupe de travail sur la notion de « conditions économiques raisonnables », qui suscite des interrogations de la part de plusieurs d'entre vous. Il s'agit d'une rémunération des actifs normale au regard des risques et des incertitudes de ce genre de chantier – je pense notamment aux infrastructures. Cette rémunération donne lieu à des consultations. Elle peut être adaptée et renforcée si certains investissements sont plus difficiles ou jugés prioritaires, comme le dossier de l'interconnexion. En pratique, elle ne remet en cause ni l'incitation à investir, ni la péréquation.

Monsieur Gaubert, il est vrai que la CRE reçoit davantage de pouvoirs – c'est d'ailleurs précisément pour cela que vous l'avez réformée avec la loi NOME, qui a imposé qu'elle élargisse ses consultations au Conseil supérieur de l'énergie.

Par ailleurs, il y aura toujours des administrateurs salariés, par exemple chez RTE, faute de quoi il faudra plus d'administrateurs indépendants.

Pour ce qui est de la recherche-développement et de la formation, dès lors qu'il existe des conventions strictes entre la maison-mère et le gestionnaire d'infrastructures, la mise en commun est tolérée. C'est probablement là un bon équilibre.

Monsieur Nicolas, il n'est arrivé qu'une seule fois que le Gouvernement refuse le TURPE. Le système qu'il vous sera proposé d'adopter le moment venu l'aurait également permis. Le pouvoir du ministre n'est nullement amputé et il ne me semble pas qu'il y ait en la matière de risque majeur.

Concernant les investissements, les dispositions nouvelles protègent les gestionnaires d'infrastructures de transport en garantissant que les groupes intégrés ne décident pas de diminuer ces investissements pour des raisons opportunistes.

Madame Massat, vous soulignez à juste titre que les moyens de la CRE devront être augmentés. Le Gouvernement a engagé avec celle-ci un dialogue ouvert pour étudier dans quelle proportion cela doit se faire.

Pour ce qui est des « conditions économiques raisonnables », je précise que la péréquation n'est nullement menacée, car les objets existants qui permettent la prise en compte des spécificités locales, comme le fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACE) ou le fonds de péréquation de l'électricité (FPE), seront maintenus.

Pour une partie au moins des barèmes de raccordement, la notification à la CRE est déjà en vigueur. Là encore, les nouvelles dispositions s'inscrivent donc dans une stricte continuité. En tout état de cause, la directive nous impose une transparence absolue.

Aujourd'hui, les agents de la CRE ont déjà des pouvoirs d'investigation et la commission de déontologie se prononce sur leur cas lorsqu'ils quittent le régulateur pour d'autres responsabilités.

Monsieur le président, de nombreuses questions portent sur la distribution, alors que la directive, qui concerne plutôt l'activité de transport, ne porte que très marginalement sur ce sujet. Le groupe de travail dont vous avez souhaité la création et qui sera mis en place dès que vous en aurez choisi les membres permettra d'apporter bien des précisions et de répondre aux inquiétudes qui s'expriment.

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