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Intervention de Brigitte Grésy

Réunion du 23 novembre 2010 à 18h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Brigitte Grésy, membre de l'Inspection générale des affaires sociales, IGAS :

Il faut appeler cette négociation, négociation sur l'égalité professionnelle et l'égalité salariale. En effet, qu'est-ce qui fait mouche dans l'opinion ? Les salaires ! Ce qui énerve le plus une femme, c'est que l'on pense qu'elle vaut moins qu'un homme sur le marché du travail. De fait, elle est moins payée qu'un homme, avec les mêmes diplômes et la même expérience. La dernière enquête de Meurs et Ponthieu montre que, parmi les quadragénaires ayant des enfants, le même diplôme et la même expérience, l'écart de rémunération est encore de 17 % au détriment des femmes. Et sur ces 17 %, il y a 70 % d'écarts inexpliqués, simplement parce qu'on est une femme, simplement parce qu'on est un homme. C'est intolérable !

Je me méfie des discours mettant en avant des écarts structurels, des écarts inexpliqués, et finalement l'idée qu'il existe des écarts licites. Par exemple, comme il y a plus de femmes à temps partiel, il serait normal que, globalement, les femmes gagnent moins. Sauf que le temps partiel est très souvent subi par les femmes. Inutile de débattre des écarts licites et des écarts illicites : les écarts s'expliquent par les inégalités existant dans notre société entre les hommes et les femmes, aussi bien sur le marché du travail que dans la vie privée.

Je ne sais pas si, à la faveur de la loi sur l'égalité professionnelle, vous pourrez travailler sur d'autres mesures. En effet, vous allez devoir transposer dans les trois ans la directive européenne sur le congé parental. Vous devrez également étudier la question du congé de maternité. Faut-il fixer sa durée à vingt semaines ? Tout le monde n'est pas d'accord. Personnellement, cela me semble beaucoup et je préférerais que l'on aménage le travail des femmes revenant de congé de maternité, pour leur permettre d'allaiter ou de rentrer plus tôt chez elles, et surtout que l'on accompagne leur retour dans la communauté du travail. Avoir un enfant n'enlève pas de compétences. Il faut lever l'opprobre qui pèse sur ces femmes et dissiper l'autocensure qu'elles s'imposent.

S'il faut travailler sur l'égalité salariale et l'égalité professionnelle au sens large, il importera aussi de travailler sur deux autres leviers : le temps partiel, même si ce n'est pas encore le moment et qu'il faut encore négocier et, surtout, la santé au travail, sur laquelle j'ai beaucoup travaillé avec l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT).

Comme je l'ai montré dans mon rapport, la santé au travail n'est prise en compte que pour le salarié masculin, sous l'angle de la pénibilité au travail. Mais on ne prend pas en compte le risque de stress des femmes – ce risque est de 40 % supérieur à celui des hommes – ni leur risque de souffrir de troubles musculo-squelettiques. Il faut étudier ces sujets. Il convient également de travailler dans le cadre de l'accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail, et notamment sur le sexisme ordinaire. Il faut absolument faire des enquêtes dans les entreprises sur la souffrance que représente la non-reconnaissance des femmes, leur fragilisation, leurs problèmes d'identité au travail. Ce qui s'est passé à France Télécom montre bien que le bien-être des salariés passe par la reconnaissance de leur identité au travail, c'est-à-dire la reconnaissance de leurs compétences et de leur savoir-faire.

Il faut mettre sur la table la fragilisation des compétences féminines que leur impose autrui et qu'elles s'imposent à elles-mêmes. Par exemple, certaines femmes, parce qu'elles rentrent de congé de maternité, n'osent pas postuler. Il faut poser la question de la souffrance au travail qui résulte du sexisme. La DARES pourrait s'y intéresser et mener des enquêtes. Il faudrait mettre le mot « sexisme » sur la table.

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