Depuis l'été 2010, les armateurs à la pêche ont reçu des demandes de remboursement pour trois aides : Erika, contrats bleus et fonds de prévention des aléas de la pêche – FPAP –, aides déjà perçues mais déclarées non eurocompatibles. Première remarque : l'Europe se montre brutalement sourcilleuse pour des aides indispensables à la survie des pêches maritimes, alors qu'elle a su faire preuve de grande mansuétude, lors de la récente crise financière, pour des appuis étatiques forts à d'autres secteurs économiques.
Deuxième remarque : cette interdiction d'aide pour compenser des conjonctures difficiles – prix du carburant, pollutions accidentelles – est une aubaine pour la Commission européenne, lui permettant ainsi d'atteindre l'objectif affiché de réduction de la flotte de pêche à moindre coût.
Troisième remarque : comment comprendre qu'au même moment et pour les mêmes motifs, d'autres États – je pense à l'Espagne ou à la Belgique – ont pu soutenir leurs pêches par le biais de prêts bonifiés, de diminution de cotisations sociales ou même d'embarquement, avec salaires dérisoires, de marins étrangers ? Je ne peux que constater que le gouvernement français n'a pas voulu ou pas su se battre pour ses pêcheurs dans ce dossier. Aucun recours n'a été formé contre la décision de la Commission du 14 juillet 2004 déclarant les aides illégales et contre la décision de la Commission du 20 mai 2008 déclarant également illégales les aides du FPAP. Une piètre présentation des dossiers, aucune mise en garde française sur l'eurocompatibilité, un risque de demandes reconventionnelles pour d'autres aides, des atermoiements pour le recouvrement et l'exigence d'intérêts moratoires : on ne peut pas dire que l'État ait brillé par l'intérêt qu'il a porté à nos pêches maritimes dans ce contentieux ! Il semble que, désormais le Gouvernement s'oriente vers un recouvrement inéquitable, ciblant particulièrement les armements de pêche hauturière, c'est-à-dire les entreprises les plus consommatrices en carburant, mais aussi les plus stratégiques économiquement par la démultiplication d'emplois et de valeur ajoutée qu'elles génèrent.
L'engagement pris par Nicolas Sarkozy lui-même auprès des équipages et des armements de les exonérer du remboursement des aides gazole sera-t-il respecté ? Quelle attention sera portée aux entreprises encore en vie – pour celles déjà liquidées, le problème ne se pose malheureusement même plus ! –, dont la viabilité économique est hypothéquée par cette véritable épée de Damoclès de demande de remboursement ?