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Intervention de Georges Tron

Réunion du 2 décembre 2010 à 9h30
Souveraineté du peuple en matière budgétaire — Discussion d'une proposition de loi constitutionnelle

Georges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique :

Fondamentalement, nous défendons une conception similaire du vote du budget comme acte souverain par excellence. Mais la vision du Gouvernement diverge ensuite de la vôtre, et je vais vous en exposer les raisons.

En premier lieu, le Gouvernement adopte une vision plus globale, et surtout de plus long terme. C'est bien parce que nous souhaitons collectivement – en particulier les pays de la zone euro – préserver notre souveraineté, y compris budgétaire, que nous nous astreignons, par l'intermédiaire du semestre européen, à une discipline plus collective.

N'oublions pas le contexte précis de cette décision : la crise économique et ses retombées. Ce contexte n'est pas, comme vous le soutenez, madame la rapporteure, un prétexte pour prendre des mesures que vous jugez sévères, mais véritablement un révélateur des progrès à réaliser pour améliorer le fonctionnement de l'Union européenne.

Le semestre européen a d'ailleurs été l'une des premières initiatives issues des travaux d'un groupe de travail sur la gouvernance économique créé en mars dernier à la demande du Conseil européen et présidé par le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.

N'oublions pas non plus que nous partageons une monnaie commune, qui est notre bien commun. La France ne vit pas isolée des autres : que l'idée plaise ou non, c'est une réalité. Dans chaque communauté, il existe des règles, et puisque nous partageons une monnaie unique, il nous faut des règles adaptées. C'est une question de bon sens que de vouloir renforcer la coordination des politiques économiques des États membres de l'Union européenne.

Enfin, veiller à la maîtrise de la dette et des déficits – une des visées du semestre européen – est un objectif absolument incontournable. C'est précisément ce qui nous permettra de conserver à terme notre indépendance vis-à-vis des marchés financiers, et donc notre souveraineté.

Deuxième idée-force : le semestre européen est le fruit d'une décision collégiale, issue d'une réflexion collective, et non un processus imposé par la Commission européenne. À l'origine du semestre européen se trouve la prise de conscience, par l'ensemble des pays de l'Union, de la nécessité de renforcer la gouvernance économique européenne. Nous souhaitons que cette gouvernance soit à la mesure du niveau d'intégration financière ayant permis de construire l'union monétaire et le marché intérieur.

L'objectif du semestre européen est double. Nous avons tout d'abord souhaité que la nouvelle procédure joue un rôle préventif, notamment dans le domaine de la maîtrise des finances publiques. Elle doit conduire à un renforcement de la discipline budgétaire des États, qui est l'un des piliers de la souveraineté nationale.

Par ailleurs, les nouvelles procédures européennes prévoient une évaluation annuelle du risque de déséquilibre et de vulnérabilité des États membres. Cet exercice annuel sera fondé sur divers indicateurs ainsi que sur une analyse économique globale, et viendra à l'appui des programmes de stabilité.

Mais la gouvernance économique ne peut se limiter à la surveillance des déficits publics – nous en sommes tous conscients et c'est aussi, je crois, un point de consensus. Par le semestre européen, nous recherchons également une coordination économique accrue entre les États. En effet, notre monnaie unique ne sera véritablement viable à long terme que si l'ensemble des pays évoluent de concert. Si les fondamentaux économiques de chaque pays sont trop différents les uns des autres, la monnaie et l'économie de toute la zone peuvent s'en trouver fragilisées.

Notre objectif est donc de réduire les écarts de compétitivité entre les États membres et d'accélérer la convergence économique dans l'Union européenne. Pour cela, nous souhaitons que les actions des uns puissent faciliter celles des autres. Nous ne souhaitons pas une Europe des individualismes, mais une Europe plus solidaire. Nous sommes en effet convaincus que la solidarité, à long terme, s'avère fructueuse et qu'un cadre favorable à une croissance forte et durable s'accommode difficilement de déséquilibres structurels importants.

Troisième et dernière idée : la mise en place de la nouvelle procédure de semestre européen nous permet d'améliorer significativement l'association du Parlement aux discussions et aux décisions européennes et son information sur celles-ci. Il ne s'agit pas d'un recul pour le Parlement, mais bien plutôt d'une avancée.

La meilleure association du Parlement doit toutefois tenir compte des contraintes du nouveau calendrier européen. Il prévoit que le programme de stabilité est dorénavant transmis aux institutions européennes par les États membres avant la fin du mois d'avril et que le conseil Écofin rend son avis sur chacun des programmes de stabilité en juillet. Dès lors, pour que le document transmis à Bruxelles engage véritablement l'exécutif et la représentation nationale, le Parlement doit intervenir en amont, avant que le programme de stabilité ne soit envoyé aux institutions européennes. Or le programme de stabilité transmis à Bruxelles fin avril doit nécessairement incorporer les informations contenues dans la notification des comptes 2010 par l'INSEE, qui a lieu le 1er avril.

C'est pourquoi le calendrier envisagé serait articulé de la manière suivante : dans la seconde quinzaine d'avril, nous informerons le Parlement du programme de stabilité avant sa transmission à Bruxelles ; fin juin, nous maintiendrons le débat d'orientation des finances publiques, qui permettra au Gouvernement d'informer le Parlement sur l'avancée des discussions européennes ; fin septembre, si les circonstances économiques le justifient, nous actualiserons éventuellement la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques pour qu'elle soit cohérente avec les textes financiers de l'automne – PLF et PLFSS.

Soyez assurés que, dès 2011, le Gouvernement informera le Parlement sur les moments pertinents de la procédure du semestre européen et l'y associera. Cette procédure nouvelle ne change rien au fait que le Parlement reste souverain pour le vote des textes financiers, PLF et PLFSS. C'est bien lui qui décide en dernier ressort.

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