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Intervention de André Schneider

Réunion du 1er décembre 2010 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Schneider, rapporteur 13 :

Monsieur le Président, mes chers collègues, je suis très heureux de vous présenter ce rapport d'une part parce que je m'occupe des relations de la France avec le Cameroun depuis trente-cinq ans, et d'autre part parce que j'étais moi-même présent lors de la signature de l'accord, le 21 mai 2009, à Yaoundé.

De quoi s'agit-il ? Il s'agit de réguler les flux migratoires entre notre pays et le Cameroun. Sachez qu'il y a quinze ans, il y avait en France plus de médecins camerounais qu'au Cameroun.

Les relations migratoires franco-camerounaises sont particulièrement denses. Le nombre important de migrations annuelles place le Cameroun au 7e rang des pays d'origine des flux migratoires vers la France et au 1er rang des pays d'Afrique subsaharienne connaissant une émigration vers la France.

Passée de 26 000 membres en 2003 à 39 000 membres en 2008, soit une hausse d'un tiers en cinq ans, la communauté camerounaise résidente en France augmente de façon régulière et constitue aujourd'hui la 4e communauté d'immigrés établis en France.

Comme l'immigration provenant de nombreux pays africains (Bénin, Congo, Sénégal, Burkina Faso…), l'immigration camerounaise est essentiellement familiale : plus de 68% du total des premiers titres délivrés en 2007 l'ont été dans le cadre du regroupement familial. Le Cameroun figure ainsi au 5e rang de l'immigration familiale en France. Et l'immigration pour motifs professionnels ne représente qu'une part infime des migrations du Cameroun vers la France, même si elle a récemment connu une légère augmentation. Quant à l'immigration irrégulière en provenance du Cameroun, les chiffres sont, par définition, difficiles à établir avec certitude. Néanmoins, le nombre des ressortissants en situation irrégulière n'est pas négligeable si l'on en juge par le nombre de mesures d'éloignement exécutées ces dernières années.

C'est pour mieux contenir l'immigration irrégulière et parvenir à un meilleur équilibre entre immigration professionnelle et immigration familiale que, dans la droite ligne des initiatives prises aux niveaux mondial et européen pour mettre les migrations au service du développement, le gouvernement a choisi de recourir à des accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire. L'accord avec la République du Cameroun qui est aujourd'hui soumis à notre approbation est le neuvième de cette série d'accords. Le texte de la convention reprend l'architecture des précédents accords du même type et comprend trois volets : tout d'abord la rénovation du dispositif d'immigration légale, qui est aménagé de façon à favoriser les migrations professionnelles temporaires ou circulaires et à limiter la fuite des cerveaux ; ensuite l'établissement d'un dispositif de lutte contre l'immigration irrégulière ; et enfin la mise en oeuvre de projets de développement solidaire censés mobiliser les compétences et les ressources des migrants camerounais au service de l'enrichissement de leur pays d'origine.

Pour ce qui est, en premier lieu, de la rénovation du dispositif d'immigration légale, l'accord institue au profit des ressortissants camerounais un traitement plus favorable que le droit commun à plusieurs égards.

Alors que le droit commun prévoit, au bénéfice des étudiants titulaires d'un diplôme de niveau master désireux d'acquérir une première expérience professionnelle sur notre territoire, une autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois, non renouvelable, l'article 2 du présent accord offre aux étudiants camerounais titulaires d'un diplôme de niveau master mais aussi d'une licence professionnelle, une autorisation provisoire de séjour de neuf mois, renouvelable une fois.

Par ailleurs, l'accord ouvre chaque année à 250 jeunes professionnels camerounais, qui entrent ou sont déjà engagés dans la vie active, et qui souhaitent améliorer leurs perspectives de carrière grâce à une expérience de travail salarié dans une entreprise française, la possibilité d'obtenir une carte de séjour les autorisant à exercer une activité professionnelle pour une durée allant jusqu'à 18 mois. Pendant cette période, ils jouiront de l'égalité de traitement, et donc de rémunérations équivalentes à celles perçues par les Français accomplissant un travail similaire. Le nombre maximal de bénéficiaires (250) est plus élevé que celui fixé pour les jeunes professionnels congolais ou béninois dans de semblables accords.

Le nombre maximal de bénéficiaires de la carte de séjour « compétences et talents », fixé à 200 pour les ressortissants camerounais, est également plus élevé que celui qui a été choisi dans les accords semblables conclus avec le Congo, le Bénin et le Burkina Faso (150). En outre, alors qu'en droit commun, cette carte n'est renouvelable qu'une fois, le présent accord ne fixe aucune limite à son renouvellement pour les titulaires camerounais.

Enfin, l'octroi de la carte de séjour temporaire pour l'exercice d'une activité salariée est chaque année ouvert à 750 Camerounais exerçant l'un des 66 métiers listés dans l'annexe II de l'accord, alors qu'en droit commun, le dispositif ne profite qu'aux professionnels relevant d'une liste de 30 métiers seulement.

Pour ce qui est, en deuxième lieu, du dispositif de lutte contre l'immigration illégale, outre l'aide au retour et la réadmission des ressortissants nationaux, le présent accord prévoit la réadmission des ressortissants d'Etats tiers, à la différence des accords de gestion concertée des flux migratoires que la France a signés avec le Sénégal et la Tunisie.

Quant à la coopération policière, notre pays entend contribuer à l'amélioration du cadre légal de la répression de l'immigration irrégulière et de la fraude documentaire et à la formation des personnels chargés du démantèlement de leurs filières. Une somme de 50 000 euros est d'ores et déjà inscrite au budget de l'année 2011 pour soutenir financièrement l'action de la police aux frontières.

Formant une articulation entre la coopération en matière de lutte contre l'immigration illégale et le partenariat en faveur du développement du Cameroun, la mise en oeuvre de la réforme de l'état civil camerounais reçoit un appui financier de la France à hauteur de 381 000 euros, appui susceptible d'être complété dans la limite d'un montant d'un million et demi d'euros dans les quatre années à venir.

Pour ce qui est, en troisième lieu, du développement solidaire, le présent accord prévoit divers mécanismes de mobilisation de la diaspora camerounaise.

Outre l'aide à la réinsertion et la mobilisation de l'épargne de la diaspora camerounaise via le compte épargne codéveloppement et le livret d'épargne pour le codéveloppement, l'accord propose un éventail de modalités de participation des migrants camerounais aux actions de développement de leur pays d'origine. La France s'est engagée à apporter, sur une période de cinq ans, un soutien financier de 12 millions d'euros à des projets relevant de quatre secteurs prioritaires : le soutien à la création de centres de formation professionnelle, le soutien aux activités productives, le développement durable et la santé. Il est prévu d'associer la diaspora camerounaise à ces projets en l'invitant à les financer à hauteur de 30%. Pris en charge en majeure partie par le ministère chargé de l'immigration et réalisés en collaboration avec des opérateurs tels que l'Agence Française de Développement, ces projets feront l'objet d'une évaluation par le comité de suivi créé par l'article 18.

Monsieur le Président, mes chers collègues, élaboré dans le souci des intérêts de la France et du Cameroun, et dans une transparence totale, l'accord qui est soumis à notre approbation offre la possibilité de mettre les migrations au service du développement social et économique des deux pays. C'est pourquoi je vous invite à voter en faveur du projet de loi n°2771 qui demande l'approbation de cet accord.

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