Ce n'est pas exactement ce qui a été mis en place.
Dois-je aussi vous rappeler, madame la ministre, les critiques formulées en juin dernier par la Cour des comptes sur la politique de regroupement dans l'enseignement supérieur et notamment à l'encontre de l'opération Plan Campus, sa gouvernance et la complexité des montages financiers auxquels elle a donné lieu ? Quelles suites comptez-vous donner à ces observations ? Nous aurions souhaité pouvoir en discuter aussi ce soir à l'occasion de l'examen de cette proposition de loi.
La dévolution aux universités de leur patrimoine immobilier, objectif central de l'article 1er du présent texte, peut se révéler un cadeau empoisonné, comme le montre le faible nombre d'universités – moins de dix aujourd'hui – qui ont fait la demande de cette compétence immobilière.
Alors que 35 % des biens immobiliers des universités sont considérés comme vétustes et que 31 % d'entre eux nécessitent de lourdes opérations de réhabilitation, les crédits destinés à la mise aux normes et à la maintenance des bâtiments sont en baisse dans le projet de loi de finances pour 2011 – Pascal Deguilhem l'a rappelé.
Dans de telles conditions, on peut se demander si les universités qui choisiront d'exercer cette compétence immobilière recevront en retour de l'État une dotation annuelle suffisante leur permettant d'entretenir et de renouveler le patrimoine transféré.
L'article 2 de la proposition de loi nous pose plus de problème. La possibilité d'habiliter les PRES à délivrer directement des diplômes nationaux en lieu et place des universités nous semble en effet dangereuse en ce qu'elle porte une atteinte grave au monopole de délivrance des diplômes par les universités publiques.
C'est un cadeau aux établissements privés, alors qu'ils ne sont pas soumis aux mêmes obligations de service public que les universités, qu'il s'agisse des contenus pédagogiques, de la neutralité des formations, des modalités d'examens, de l'absence de sélection des étudiants, ou de la réglementation des droits d'inscription. Une telle possibilité va encore exacerber la concurrence entre établissements publics et privés.
Si les PRES peuvent constituer une chance pour les universités, qu'en est-il pour celles qui n'en font pas partie ? Faut-il, prenant pour seule boussole le classement de Shanghai, pourtant très contesté et contestable, et au nom de la concurrence et de la compétitivité, accroître encore le fossé qui sépare les pôles d'excellence des pôles universitaires de proximité, notamment ceux qui ne font pas partie des PRES ? Il ne faudrait pas qu'ils soient cantonnés aux premiers cycles et soumis à la concurrence des PRES pour la délivrance des diplômes nationaux.
Ces établissements de proximité obtiennent pourtant d'excellents résultats en matière d'insertion professionnelle des étudiants de niveau master. Une récente enquête faisait apparaître des taux de réussite proches de ceux des grandes écoles : autour de 92 %.
Nous souhaitons donc, à l'occasion de l'examen de ce texte, vous poser à nouveau la question essentielle de la concentration des moyens financiers dans l'enseignement supérieur sur les pôles d'excellence. Cette première interrogation en suscite une seconde : quelles sont les possibilités de financement des autres projets immobiliers dans les établissements de taille moyenne ou plus modeste ? Je prends souvent l'exemple du projet de transfert à Saint-Étienne de la faculté des sciences de la Métare sur le site Manufacture Plaine Achille. Ce petit projet en termes de coût – quelques millions d'euros – est en effet extrêmement structurant pour un pôle universitaire comme celui de Saint-Étienne. Pourtant, il ne bénéficie pas, pour le moment en tout cas, d'un soutien financier de l'État.
Madame la ministre, toutes ces observations s'ajoutant à celles présentées par Pascal Deguilhem, nous ne pourrons voter cette proposition de loi sur les activités immobilières dans l'enseignement supérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)