…puisqu'il traite à la fois de l'immobilier des universités, de la délivrance des diplômes et du recrutement des responsables de biologie dans les centres hospitalo-universitaires.
Texte d'opportunité également, car il est examiné à un moment où le Gouvernement s'est engagé sur la voie d'une restructuration profonde du service public d'enseignement supérieur et de la recherche. L'objectif officiel est d'assouplir le cadre juridique qui régit le patrimoine immobilier universitaire, dans le but d'en faciliter la réhabilitation et de réaliser des constructions nouvelles. Mais, en renforçant les attributions des pôles de recherche et d'enseignement supérieur, le texte marque en réalité un profond changement de cap de la stratégie universitaire, sans que ce changement ait été précédé d'un bilan d'étape des PRES.
Votre volonté, madame la ministre, est bien de faire le tri entre les différents établissements afin de concentrer l'essentiel des moyens et de rassembler les meilleures formations dans un nombre très réduit de pôles d'excellence. Certes, il est important pour notre pays de se doter de campus d'excellence, et pas seulement au regard d'un classement modèle. Mais nous militons pour une réforme universitaire qui se fasse dans le respect des spécificités de l'université française.
Aussi considérons-nous que votre méthode n'est pas la bonne. Ce transfert accéléré ne peut pas se faire au détriment des universités, dont beaucoup n'auront pas de moyens suffisants pour gérer leur patrimoine. Il ne peut pas non plus consacrer de fait un système déjà très inégalitaire entre les établissements. Réformer l'université pour lutter contre l'échec à l'université, d'accord, mais remédions en priorité à son sous-encadrement et à son sous-financement : là sont les premières urgences.
Le texte aura pour conséquence de contraindre une grande majorité d'établissements de second rang à se contenter de financements en baisse et à limiter leur activité aux formations de niveau licence, donc, à terme, à abandonner la recherche.
Les deux premiers articles de la proposition de loi, qui confortent les PRES, porteurs de la plupart des projets du plan Campus, dans leur rôle d'opérateurs privilégiés de la recomposition du paysage universitaire, suscitent des interrogations.
Ces interrogations portent tout d'abord sur les activités immobilières, visées à l'article 1er, et sur l'accélération du processus de transfert de propriété pour les établissements qui en feraient la demande. Peu nombreux sont ceux qui en ont exprimé le souhait, mais l'accélération de la possibilité donnée aux universités de confier à des tiers des droits réels sur le patrimoine immobilier des établissements d'enseignement supérieur est un signe supplémentaire du désengagement de l'État du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Il est bien précisé que la dévolution immobilière n'est que facultative, mais permettre aux PRES de disposer du patrimoine immobilier des universités avant même que celles-ci aient pu en demander la dévolution, n'est-ce pas leur permettre d'exercer des pressions sur les universités ? À court terme, leur patrimoine échappera à leur contrôle, puisqu'il sera confié aux PRES, qui auront eux-mêmes conféré les droits réels, c'est-à-dire l'exploitation, à un prestataire privé.
À notre sens, la mise en oeuvre d'un tel dispositif n'est pas urgente. Une remise à niveau préalable du patrimoine universitaire par l'État, donc un effort financier de celui-ci, nous paraît à tout le moins nécessaire. Assurer la sécurité est, du reste, une obligation qui s'impose à l'État, et nous connaissons – hélas, assez mal – l'état de besoin du patrimoine universitaire. Ce n'est pas la voie qui a été choisie, puisque les crédits consacrés à la sécurité et à la maintenance des bâtiments sont en baisse dans le PLF pour 2011. Le texte risque, en outre, de renforcer l'inégalité entre les territoires. La question des financements revêt une importance majeure. Dans quelle mesure les collectivités territoriales seront-elles concernées par ce transfert ?
Par ailleurs, présenter la dévolution des droits réels à des tiers comme indispensable à la mise en oeuvre des PPP n'est guère crédible, si l'on considère que des opérations de ce type ont pu être conduites sans transfert de droit. Je vous pose donc la question, madame la ministre : peut-on, oui ou non, conduire, sous le régime actuel de la propriété immobilière des établissements d'enseignement supérieur, des opérations de construction et de réhabilitation en partenariat public-public ou public-privé ? Si tel est le cas, on peut se demander si cette incitation au transfert et cette promotion des PPP nouvelle formule, dits intelligents, ne poursuivent pas un autre objectif. Souhaite-t-on offrir ainsi davantage à des partenaires privés qui espèrent un retour sur investissement important et dont l'appétit de rentabilité n'est pas forcément compatible avec l'accomplissement des missions de service public de l'enseignement supérieur ? Notre intention est, non pas, bien entendu, de stigmatiser la coopération public-privé, qui peut avoir des aspects positifs, mais de souligner les facteurs de risque, à l'instar de la Cour des Comptes, qui a émis des réserves sur ces partenariats.
Nous nous posons un certain nombre de questions. Tout comme nos collègues sénateurs, nous aurions préféré que, deux ans et demi après le vote de la loi LRU, un bilan soit établi. Nous partageons également les inquiétudes de nos collègues quant au risque supplémentaire, même si ce n'est pas l'objet du texte, que la concentration fait courir aux petites universités et aux antennes universitaires, qui participent pourtant à l'aménagement du territoire.
Ce risque est, me semble-t-il, renforcé par le deuxième article de la proposition de loi, qui donne aux PRES la possibilité de délivrer directement des diplômes nationaux lorsqu'ils sont constitués en établissements publics de coopération scientifique. Aux PRES, la délivrance de diplômes nationaux et aux petites universités la délivrance de diplômes dont la valeur nationale sera douteuse : oui, le risque de fracture dans l'université est bien réel. Si nous sommes bien entendu favorables à la coopération universitaire, il nous semble que le monopole de délivrance des diplômes nationaux par les universités publiques est un gage d'égalité républicaine.
Avec l'article 2, nombre d'établissements privés pourront, dès lors qu'ils seront rattachés à un PRES, délivrer des diplômes nationaux au même titre que les établissements publics, sans être soumis aux mêmes obligations que ces derniers. Vous instaurez ainsi une concurrence déloyale entre ces établissements, puisqu'ils ne sont pas soumis aux mêmes règles. Je ne m'attarderai pas sur les déséquilibres territoriaux qu'engendrera immanquablement la proposition de loi, puisque les pôles d'excellence seront forcément plus attractifs que les petits établissements implantés dans les territoires. L'université à deux vitesses est déjà en marche, et nous accentuons cette évolution.
L'article 3 de la proposition de loi a été supprimé par les sénateurs le 17 novembre dernier, et il n'y a aucune raison qu'il soit réintroduit dans le texte ce soir,…