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Intervention de Marcel Rogemont

Réunion du 30 novembre 2010 à 15h00
Lutte contre les marchands de sommeil — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarcel Rogemont :

Je lis que cette proposition de loi vise à lutter contre les marchands de sommeil. Vous dites par ailleurs, monsieur le rapporteur, qu'il existe en France plus de 600 000 logements considérés comme insalubres, dont la moitié appartiennent à des propriétaires bailleurs. Vous rappelez enfin que le Gouvernement fait de la lutte contre l'habitat indigne une de ses priorités. Vous avez raison de le rappeler, car c'est une de ses priorités parmi tant d'autres, au point que beaucoup cherchent les sujets qui ne sont pas prioritaires !

Votre texte est donc bien beau, mais qu'en est-il réellement du sort qu'il réserve aux marchands de sommeil ? Je crois raisonnable de dire que personne ne leur est favorable. Donc, attaquons-nous aux marchands de sommeil !

Si la priorité du Gouvernement est de lutter contre l'indignité de ces 300 000 logements mis en location, plusieurs questions se posent, dont celle ci : l'ANAH, dont la mission première était d'aider les propriétaires bailleurs à réhabiliter les logements, se voit aujourd'hui assigner la mission d'aider prioritairement les propriétaires occupants.

Ainsi, en tant que conseiller général d'Ille-et-Vilaine délégataire à la pierre, je préside la commission locale d'amélioration de l'habitat, dont les objectifs fixés par l'État sont d'allouer plus de 80 % des crédits aux propriétaires occupants, soit moins de 20 % pour les propriétaires bailleurs. La question des propriétaires bailleurs n'est donc plus une priorité !

Par ailleurs, votre proposition de loi, à part son titre et quelques rappels de ce dernier, ne parle que de l'habitat indigne et non des marchands de sommeil, ceux-là mêmes qui louent dans des conditions inadmissibles de salubrité et de surpeuplement. Rien dans l'exposé des motifs ni dans le dispositif ne les concerne véritablement, car ils ne possèdent au total qu'une faible part des logements indignes.

Lors du débat sur la loi portant engagement national pour le logement, Jean Yves Le Bouillonnec avait essayé de donner corps à la notion de permis de louer. Il y a dans cette proposition une piste à explorer. Nous devons être saisis – la loi vous en fait obligation, monsieur le secrétaire d'État – d'un rapport sur l'expérimentation d'un permis de louer. Où en est ce rapport ? Probablement à sa rédaction finale car il doit être présenté au bureau de l'Assemblée avant la fin de l'année. C'est à la lumière de ce rapport que nous pourrons légiférer réellement sur les marchands de sommeil. Car le permis de louer nous semble une des voies à emprunter, tout comme le renforcement des poursuites judiciaires.

La question du logement, même si elle recouvre celle de l'habitat indigne, est surtout celle du surpeuplement de certains logements, de l'exploitation de la misère, de l'exploitation de l'absence d'offre de logements à un prix abordable. C'est aussi la question de ceux qui abusent de ces situations.

Or vos réponses se limitent à l'instauration d'astreintes supplémentaires. Soit, s'il s'agit de lutter contre l'habitat indigne. Mais que proposez-vous contre les personnes qui exploitent la misère ? Rien.

On peut même imaginer que ces astreintes supplémentaires seront comme un signe adressé aux marchands de sommeil, leur laissant entendre qu'avant d'éventuelles sanctions pénales, ils n'auront d'abord à craindre que des astreintes, contre lesquelles des recours sont possibles. Bref, votre proposition risque d'adoucir leur situation plus que de la compliquer.

Je sais que certains de nos collègues pensent que l'instauration d'un permis de louer ne serait pas une bonne chose, car cela accroîtrait la lourdeur administrative, mais quelle que soit la solution, elle se traduira nécessairement par plus d'administration.

Avec le texte présenté aujourd'hui, je serais tenté de dire que vous vous intéressez plus aux conditions de travail et d'exploitation des marchands de sommeil qu'au problème de l'exploitation indécente de la misère et à la crise du logement. Car, dans notre pays, nous manquons de logements locatifs sociaux.

Nous souhaitons que nos réflexions communes aillent vers la définition d'un permis de louer, dont la détention garantira les locataires et la non-détention pourra être sanctionnée.

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