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Intervention de Brigitte Grésy

Réunion du 29 juin 2010 à 17h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Brigitte Grésy, membre de l'IGAS, auteur du rapport préparatoire à la concertation avec les partenaires sociaux sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes :

C'est vrai, mais on continue de ne pas appréhender sa nature exacte. Pour l'instant, c'est trop souvent un immense fourre-tout qu'une accumulation de chiffres rend incompréhensible. Il faut donner une vocation précise : le suivi de l'accord pour les années N, N+1 et N+2.

Je considère qu'il faut définir des leviers d'action. J'en avais déterminé une dizaine, étant entendu qu'il faudra évidemment faire une différence entre les PME et les grosses entreprises, celles-ci pouvant mobiliser de plus nombreux leviers que celles-là. Ces leviers, définis par décret, devraient obligatoirement figurer dans l'accord sur l'égalité ou, à défaut, dans le plan unilatéral proposé par l'employeur si aucun accord n'est intervenu ou en l'absence de délégué syndical. Nous avons retenu quatre leviers de mixité, purement quantitatifs : l'embauche de femmes, leur accès à la formation qualifiante, leur accès aux promotions et leur accès aux postes de direction ; un levier relatif au temps partiel et des leviers liés à la parentalité : l'offre de services aux familles et la gestion du temps, mais aussi le travail sur les process de ressources humaines. En effet, l'évaluation des compétences des femmes, censée être neutre, se fait en réalité sous le prisme de critères masculins, puisqu'elle est fondée sur la présence permanente, sur une carrière linéaire, sur la détection des hauts potentiels entre 25 et 35 ans alors que c'est l'âge où les femmes font les enfants et sur les rôles modèles dans l'entreprise, où l'on organise l'invisibilité des femmes aux postes de direction… Il faut donc revoir l'évaluation des performances et des compétences en tenant compte de ce que l'effectif salarié est mixte et que la présence au travail des hommes et des femmes n'est pas la même parce que leurs rôles sociaux ne sont pas les mêmes. Enfin, les autres domaines où les choses doivent changer sont les rémunérations, la politique de communication et la différence de valorisation des métiers majoritairement féminins et majoritairement masculins.

Leviers, objectifs chiffrés et indicateurs de suivi sont indispensables, car il n'est pas de politique d'égalité efficace sans convaincre et sans contraindre, et pour contraindre il faut des chiffres, qui seuls font preuve. L'analyse des politiques d'égalité professionnelle suivies en Europe montre que leur succès dépend de quatre conditions : la prise en compte de cette politique au plus haut de l'organisation ; le comptage par des objectifs chiffrés et des indicateurs ; l'évaluation périodique et systématique de ces objectifs et de ces indicateurs ; en cas de manquement, la sanction de la personne responsable de l'inapplication de cette politique, et de l'organisation elle-même si ce n'est pas fait. Autant dire que la définition dans les accords de leviers de changement assortis d'objectifs chiffrés a une importance cruciale.

L'article 13 (IV) se lit ainsi : « Dans les entreprises de plus de 300 salariés, l'employeur organise, après consultation du comité d'entreprise, la publicité d'indicateurs et d'objectifs de progression, fixés par décret, permettant d'analyser la situation comparée des femmes et des hommes dans l'entreprise et son évolution. L'employeur qui, au plus tard le 31 décembre 2011, n'a pas respecté les dispositions du précédent alinéa, communique à toute personne qui en fait la demande les indicateurs et objectifs mentionnés à l'alinéa précédent. »

Sont fixés ici l'embryon de la définition de leviers et une obligation de publicité, mais sans sanction.

Outre la simplification du code du travail et la définition de leviers d'action, j'avais proposé deux types de sanction : la conditionnalité des allègements de charge, système un peu compliqué, ou une sanction de 1 % de la masse salariale.

Le I de l'article 13, fait porter la sanction sur le défaut d'élaboration du RSC. L'écart avec ma proposition tient à ce que j'avais proposé une sanction en deux temps : une sanction en cas de défaut de production du RSC la première année après la promulgation de la loi ; une autre l'année suivante en cas de non négociation d'un accord ou en l'absence de plan unilatéral fourni par l'employeur portant sur des mesures relevant des dix leviers de l'égalité et assortis d'objectifs chiffrés et d'indicateurs, en fonction de la taille de l'entreprise.

Par ailleurs, l'article 13 n'est applicable qu'aux entreprises de plus de 300 salariés. Jusqu'à présent, les exigences concernant les entreprises employant de 50 à 300 salariés sont moindres, mais elles sont néanmoins tenues de présenter un rapport sur l'égalité professionnelle. On peut donc craindre qu'elles ne s'exonèrent de cette obligation, qui doit être rappelée.

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