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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 25 novembre 2010 à 9h30
Lutte contre la prolifération des armes de destruction massive — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot :

Si notre pays est membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, cela lui impose non seulement des devoirs mais cela lui donne aussi des droits, au premier rang desquels la dissuasion nucléaire.

Mes chers collègues, je tiens, au nom du groupe Nouveau Centre et apparentés, à souligner à quel point il s'agit d'un texte majeur, ne serait-ce que parce qu'il permet à notre pays de respecter ses engagements internationaux.

Je pense, bien entendu, à la résolution n° 1540 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies en 2004, renforcée par la résolution n° 1810 de 2008, qui fait obligation aux États d'améliorer leurs outils juridiques afin de prendre en compte toutes les dimensions de la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, de leurs vecteurs et des matériels connexes.

Je pense également à la résolution n° 1887 de 2009 qui reconnaît la nécessité pour tous les États d'adopter des mesures efficaces afin d'empêcher que des terroristes ou des États voyous aient accès à des matières nucléaires ou à une assistance technique.

Le texte qui nous est proposé revêt également une grande importance du fait du caractère multiforme de la menace, comme en témoigne l'étude d'impact fournie par le Gouvernement : celle-ci peut émaner du comportement non seulement d'États, comme la Corée du Nord et l'Iran, mais aussi de réseaux clandestins privés – voire de particuliers – ou encore de mafias s'approvisionnant auprès de vendeurs de matières et de technologies nucléaires.

Au nom des centristes, je veux apporter tout mon soutien à plusieurs dispositions fondamentales de ce texte.

Premièrement, comme vous le savez, notre arsenal législatif réprimant les actes et comportements proliférants nécessite d'être révisé car il comporte des lacunes sur de nombreux points : je pense à l'absence de toute incrimination des vecteurs et des financements et à la disparité des peines dans les domaines biologique et chimique. En harmonisant la définition des infractions et des peines applicables aux activités de prolifération dans les domaines nucléaire, biologique et chimique, le texte constitue donc une avancée majeure.

Dans notre droit actuel, les peines sont, en effet, différentes en cas d'actes de prolifération en matière nucléaire, chimique et biologique. En l'état actuel des textes, la répression la plus sévère s'exerce dans le domaine de la prolifération chimique – les actes qui la constituent, considérés comme des crimes, sont passibles de vingt ans de réclusion criminelle et d'une amende de 3 millions d'euros – tandis qu'elle est la plus légère dans le domaine des armes de destruction massive biologiques, avec des peines de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, portées à dix ans et 500 000 euros si l'infraction est commise en bande organisée.

L'article 6 du projet de loi aligne le dispositif répressif en matière biologique sur celui existant en matière chimique. Ce renforcement est d'autant plus indispensable que les menaces chimique et bactériologique sont au moins aussi importantes que celles constituées par les bombes à cobalt.

Il a été rappelé un certain nombre d'attentats commis par des personnes ou des groupes qui ont essayé de manipuler des armes chimiques et bactériologiques. Souvent qualifiées d'« armes de dissuasion massive du pauvre », celles-ci constituent un enjeu important et font peser un risque très lourd.

En matière nucléaire, le projet de loi aggrave les peines existantes, l'ajout de circonstances aggravantes permettant d'accroître la répression. Les peines s'échelonneront de dix à trente ans de réclusion pour les infractions les plus graves, avec une amende maximale de 7,5 millions d'euros.

De nombreux textes et mécanismes internationaux permettent de combattre la prolifération nucléaire. Comme vous le savez, la France est signataire de la totalité des textes, qu'il s'agisse du traité de non-prolifération – TNP –, du protocole additionnel au TNP, des conventions sur l'interdiction des armes biologiques comme chimiques ou encore du code de conduite de La Haye sur les missiles balistiques. Elle fait également partie du comité Zangger et du groupe des fournisseurs nucléaires. Je souligne encore son engagement sur la problématique des armes à sous-munitions. C'est dire si la position de notre pays est exemplaire. Cela méritait d'être souligné.

La législation française est donc, à travers le texte qui nous est soumis, complétée par plusieurs règlements européens, notamment par celui sur les biens à double usage.

En outre, en adaptant notre dispositif à la totalité des pratiques en usage par les individus, réseaux ou États faisant acte de prolifération, ce texte accorde une place importante à la répression du financement de la prolifération.

Enfin, il étend aux activités proliférantes les règles de procédure applicables à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, leur conférant ainsi un degré de gravité équivalent.

Il s'agit, comme vous le savez, de dispositions dérogatoires au droit commun, comme la possibilité de centraliser les enquêtes et jugements au tribunal de grande instance de Paris, le recours pour le jugement aux seuls magistrats professionnels et l'utilisation de techniques spéciales d'enquête.

Après avoir souligné à nouveau toute l'importance de ce texte, Je vais, au nom du groupe Nouveau Centre et apparentés, faire deux remarques.

Premièrement, j'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de ne pas interpréter l'objectif de contrôle des biens et technologies à double usage de façon trop restrictive afin de ne pas pénaliser nos entreprises à l'exportation, d'autres pays que le nôtre, notamment européens, ayant moins de scrupules. Je cite, pour illustrer ce point, l'exemple d'une entreprise de ma circonscription qui s'est vue interdire l'exportation de pompes à pétrole spécifiques, tandis que la filiale néerlandaise de son groupe obtenait très rapidement l'autorisation. Il n'est pas logique qu'il y ait deux poids, deux mesures en la matière et qu'existent deux interprétations différentes à l'échelle européenne. Cela a des conséquences sur l'emploi et le développement de ces entreprises.

Deuxièmement, je tiens à m'associer au regret formulé par le rapporteur de ce texte que certains champs ne soient pas couverts par celui-ci. Je pense, bien entendu, aux engins radiologiques, parfois appelés « bombes sales », et aux attaques cybernétiques qui, si elles ne sont pas des armes de destruction massive au sens classique du terme, contiennent néanmoins un important potentiel de désorganisation de nos sociétés modernes. Les attaques cybernétiques contre l'Estonie suffisent pour s'en convaincre.

Comme vous l'aurez compris, mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre et apparentés votera en faveur de ce texte, que notre assemblée s'honorerait d'adopter à l'unanimité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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