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Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 3 juillet 2008 à 21h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Article 17

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue :

Cet article 17 est probablement l'une des pires dispositions de ce projet de loi. En fait, il vise à banaliser un dispositif qui avait du sens lorsqu'il était destiné aux cadres ou à certaines professions dont l'organisation justifie des règles particulières. Avec cet article 17, vous nous proposez une banalisation de ces conventions. N'importe quel salarié pourrait être soumis à des extensions de forfaits hebdomadaires ou mensuels, en heures et pour l'ensemble de sa mission.

Ce dispositif est particulièrement préoccupant car, comme l'a souligné Jean Mallot, il ouvre l'ère de d'individualisme, de l'individualisation de la durée du travail. Ce développement du gré à gré offre de la souplesse aux employeurs, mais prive les salariés de toute visibilité en termes de prévision d'activité – c'est le moins que l'on puisse dire.

Avec ces conventions de forfait, nous nous situons dans le cadre d'accords d'entreprises, mais les dispositifs manquent de clarté sur divers aspects : les populations concernées, les modalités d'utilisation des forfaits, les limites du forfait des durées hebdomadaires contenues dans la convention écrite formalisant l'accord du salarié.

Ces conventions de forfait annuel que vous proposez d'étendre peuvent conduire à des amplitudes horaires très élevées, avec pour seuls garde-fous les durées hebdomadaires maximales, et le nombre total d'heures travaillées sur une année qui pourra être particulièrement important. De plus, si les conventions de forfait jours ont globalement les mêmes caractéristiques que les conventions annuelles en heures, elles ne permettent pas le décompte du temps réellement travaillé. Ce n'est pas anodin car un jour de travail peut atteindre huit heures, treize heures ou même davantage.

Au niveau des principes, le forfait jours concilie la liberté et l'autonomie d'un salarié d'une part, l'évolution des organisations du travail peu assimilables à un horaire prescrit d'autre part. Dans les faits, il se traduit par des contraintes extrêmement fortes pour une partie des salariés concernés.

En dix ans d'expérimentation, le législateur n'a pas su trouver un encadrement adéquat, reconnaissons-le. Les souplesses permises par les forfaits jours ont conduit des entreprises à y recourir massivement, n'hésitant pas au besoin à modifier le statut du salarié pour lui imposer ce système.

Il est clair que ce type de forfait doit être très encadré par la loi, tant sur l'aspect des populations concernées que sur celui des limites de durée. Considérer qu'un salarié en forfait jours peut régulièrement travailler six jours sur sept, sans avoir une idée de ses amplitudes de travail, aurait des conséquences sur la santé les personnes concernées. Ce type d'organisation du travail aurait aussi et un coût humain et économique pour la société.

À l'évidence, cet article 17 déréglemente d'une manière brutale et importante, en généralisant des mesures qui se justifiaient pour les seuls cadres. À notre sens, cette extension que vous proposez aujourd'hui est préjudiciable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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