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Intervention de Bernard Lesterlin

Réunion du 23 novembre 2010 à 15h00
Département de mayotte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Lesterlin :

Oui, cela signifie que les élus mahorais vont assumer, après la « décentralisation » de 2004, des compétences antérieurement dévolues à l'État, et que les contribuables vont payer des impôts comme tout le monde dans la République.

Mais la différence, c'est le point de départ. Il n'est pas le même : l'état des écoles primaires ; l'état des routes, même si un effort a été fait sur certains tronçons au cours des derniers mois ; la voirie urbaine, notamment à Mamoudzou ; les constructions scolaires du secondaire, qui ont dû faire face à l'explosion démographique, conduisant l'État à construire les derniers collèges et lycées en ALGECO ; l'aide sociale à l'enfance, qui a démarré sans moyens alors que les besoins sont immenses. On a l'impression que le Gouvernement cherche à gagner du temps en pariant sur la fiscalité locale, qui n'entrera en vigueur qu'en 2014.

On n'a pas le droit de tromper les Mahorais sur ce que seront les droits et devoirs d'un département. On n'a pas le droit, surtout, de les décevoir par rapport au choix qu'ils pensent avoir fait en demandant à devenir un DOM comme les autres. Nous avons accepté de les accompagner dans ce choix ; cela signifie que c'est la solidarité nationale qui doit financer ce rattrapage.

On ne peut pas demander à Mayotte, où le PIB par habitant est cinq fois inférieur à celui de la France dans son ensemble et trois fois inférieur à celui de la Réunion, de payer seule non seulement les compétences transférées par l'État avec la départementalisation mais en outre les retards d'investissement de l'État, dans une île où les administrations publiques, essentiellement l'État, assuraient 49 % du PIB, contre environ 20 % pour la France, comme vous le savez.

Un revenu par habitant beaucoup plus bas que dans le reste de la République, donc une capacité contributive faible ; un poids de la puissance publique – l'État – deux fois plus lourd qu'ailleurs, mais des collectivités locales que nous savons exsangues ; des exportations faibles, des importations massives, y compris de ce qu'il serait possible de produire sur place, bref une balance commerciale gravement déficitaire ; des potentialités touristiques certes importantes, mais des infrastructures très peu nombreuses et une destination qui souffre de l'absence de liaison aérienne directe avec l'Europe et d'un manque de produits touristiques intégrés avec Madagascar, les Comores et la Réunion : en résumé, Mayotte est une économie de plus en plus artificielle, sous perfusion, isolée, trop isolée de son environnement régional. S'ajoutent à cela un chômage entre deux et trois fois plus important qu'en métropole et la bombe à retardement que constituent les enfants abandonnés. Par le vote que nous allons exprimer ce soir, nous devons assurer les Mahorais que la solidarité de la nation ne les oubliera pas, même si les temps sont durs pour tout le monde.

Nous devons notamment les aider à relever deux défis. Le premier, c'est celui de la jeunesse. Je vous ai déjà interpellée, madame la ministre, lors de la discussion budgétaire, au sujet de l'initiative que nous avons prise, sur l'ensemble de ces bancs, de mettre en oeuvre le service civique à Mayotte. L'absence de publication du décret que vous devez signer ne le permet pas. Je souhaite également vous encourager dans la réalisation rapide de la Maison de l'adolescent, dont j'ai appris qu'elle était un projet concret, car créer des observatoires ne sert véritablement à rien.

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