Eh oui ! Les autorités demandent, en effet, la collaboration des citoyens. Ainsi le préfet Denis Robin estime-t-il que « l'efficacité [de la politique actuelle] ne peut reposer uniquement sur l'État » et en appelle au « civisme » des Mahorais, en affirmant : « Les Mahorais doivent apporter leur concours à cette politique par une attitude civique et responsable. » Cela ne vous rappelle-t-il rien ? De tels propos sont dangereux, ils encouragent la chasse aux non-Mahorais et ne peuvent qu'accroître la xénophobie.
En 2008, un comité de la société civile mahoraise s'est ainsi publiquement engagé à collaborer avec les autorités, prônant la délation jusque dans les hôpitaux. Dans ce contexte, l'optimisme quant aux évolutions que pourrait engendrer la départementalisation n'est pas de mise. Un magistrat en poste depuis plusieurs années à Mayotte s'exprime ainsi : « La situation me semble ingérable » et « La départementalisation va peut-être régler un certain nombre de problèmes matériels pour les Mahorais… » – la ministre l'a évoqué – «… mais elle va en créer d'autres bien plus graves. »
Peu importe les conséquences humaines dramatiques, votre gouvernement persiste et signe : le pacte pour la départementalisation énonce que «… les règles de droit de l'entrée, de l'éloignement et du séjour sur le territoire national, spécifiques à Mayotte, ne sauraient être affectées par la départementalisation » ; il ajoute que « le nombre de personnes reconduites traduit bien l'ampleur de l'effort réalisé par l'État. Cette politique sera poursuivie. » Il n'est pas concevable d'envisager un avenir harmonieux dans l'archipel des Comores si la France poursuit dans cette voie. Tant que les contrôles de police institués par les autorités françaises continueront à empêcher la libre circulation des Comoriens dans leurs propres îles et que l'énorme différence de développement économique entre Mayotte et les autres entités de la région sera maintenue artificiellement par la France, nous aurons à déplorer d'autres drames humains.
Je ne peux, enfin, pas résister à la tentation d'ajouter une observation, madame la ministre.