Je commencerai mon propos par deux observations sur ce qui vient d'être dit. En premier lieu, le permis de construire est exigé au-dessus de 250 kW et uniquement pour les centrales au sol, puisque pour les installations de toiture une simple déclaration de travaux suffit. Celle-ci est obtenue en quelques mois, ce qui n'est pas le cas d'un permis de construire, que l'on peut attendre jusqu'à deux ans. Cela explique le grand nombre de projets sur toiture dans la file d'attente.
En second lieu, il me semble que le président de la CRE opère une confusion. Dans la file d'attente, on rencontre des projets qui se sont vu attribuer un tarif. Mais ils ne sont pas forcément en attente de raccordement car, pour la majeure partie d'entre eux, ils ne donneront pas lieu à réalisation. Ce n'est pas parce qu'un projet figure dans la file d'attente qu'il sera concrétisé – de nombreux dossiers ne sont pas sérieux et ne sont déposés que par effet d'aubaine.
Nous sommes parfaitement conscients que le tarif photovoltaïque induit des subventions très élevées. Le solaire fournit l'énergie renouvelable la plus chère à produire.
Par ailleurs, la société EDF Énergies nouvelles s'est d'emblée inscrite dans la perspective d'une filière industrielle, sans laquelle on ne peut envisager une activité durable. Il existe deux types d'installations photovoltaïques : les panneaux fixés sur les toitures et ceux posés au sol. Les premiers, plus anciens, sont composés de silicium cristallin. Ceux posés au sol, dits « en couches minces », constituent une nouvelle génération technologique plus compétitive.
Le solaire représente un gigantesque potentiel. Il appartient à l'État, et non aux acteurs économiques, de décider de doter la France d'une industrie de cellules photovoltaïques. Si nous voulons une filière compétitive, si nous voulons exporter nos produits, nous devons mettre en place une industrie de semi-conducteurs et développer la cellule, élément qui crée la valeur ajoutée. Les autres éléments sont l'encapsulation, l'équilibre du système, l'étanchéité, l'électricité et l'installation, mais ce n'est pas sur eux que repose la compétitivité par rapport aux pays concurrents. La France ne doit pas rester à quai dans l'attente vaine d'un avantage procuré par ses équipes de recherche. Si nous nous contentons de fabriquer des panneaux au silicium cristallin, nous serons perdants avant d'avoir commencé. C'est une technologie déjà très répandue dans le monde : ainsi, les Chinois jouissent d'une position favorable du fait du faible coût de leur main-d'oeuvre et d'importantes subventions ; ils produisent 30 % moins cher que nous.
Si nous voulons une industrie photovoltaïque, c'est sur les couches minces qu'il faut investir, c'est pour elles qu'il faut mettre en place les conditions favorables au développement d'un marché. C'est chose faite si l'on en croit ce que déclarait M. Borloo il y a deux ans. La construction de la première usine de panneaux en couches minces en France, avec First Solar, débutera à la fin de l'année ou au début 2011.
En ce qui concerne le silicium, la France abrite la société Photowatt, qui existe depuis très longtemps mais qui a perdu sa compétitivité face à la concurrence chinoise. Toutefois, elle développe une importante recherche en partenariat avec le CEAEA, et nous avons bon espoir que, dans les trois ans à venir, elle emploiera une technologie plus performante.
Il faut développer une industrie photovoltaïque dans notre pays et ne pas mobiliser la totalité des subventions aujourd'hui. Nous aurons aussi besoin d'argent demain, lorsque la nouvelle technologie du silicium sera au point.
La file d'attente gagnerait à être purgée de tous les projets spéculatifs qui l'encombrent. Il faut contrôler les dossiers et s'en tenir aux projets sérieux. N'oublions pas que le photovoltaïque a fait naître en France une filière liée à l'installation des panneaux, qui emploie environ 20 000 personnes. Même si les cellules des panneaux de toiture viennent de Chine, les éléments annexes donnent du travail aux entreprises et aux artisans français. L'intérêt national commande de maintenir cette filière active jusqu'à ce que les panneaux soient totalement français.
Le succès passe par un investissement massif dans la recherche. Notre pays a beaucoup d'atouts : une recherche de grande qualité et d'excellents ingénieurs électroniciens, au Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN), au CEAEA et à l'Institut national de l'énergie solaire (INES). EDF Énergies nouvelles a dépensé 30 millions d'euros pour un projet de couches minces – Necxis – et nous prévoyons d'engager la même somme en 2011. Nous avons bon espoir quant à l'émergence d'une filière française.