Faute d'avoir clarifié les compétences, faute d'avoir financé la mise en place d'une nouvelle architecture, vous tentez de faire croire que vous allez régler la question par une nouvelle forme de gouvernance de ces collectivités. D'ailleurs, j'ai le sentiment que, comme toujours, on parle de gouvernance quand on ne veut plus parler de démocratie. Et pour cause, en ce qui concerne ce texte ! Ainsi est né le conseiller territorial.
L'institution des conseillers territoriaux créera la confusion. Elle illustre deux tentations contradictoires : l'absorption des départements par la région et la digestion de la région par les départements. Elle multiplie par deux le nombre des conseillers régionaux, ce qui va à l'encontre de l'objectif affiché, et, dans le même temps, dans certains départements, elle divisera pratiquement par deux le nombre des conseillers généraux, ce qui nuira à la proximité entre les élus et les territoires. Ces propos, ce n'est pas moi qui les ai tenus ; c'est le jugement sans appel que je me contente d'emprunter à l'un des vôtres, à savoir Jean Arthuis, président de la commission des finances du Sénat.
Confusion donc que la création des conseillers territoriaux, mais également manipulation, une manipulation qui va à rencontre de toute l'évolution récente de nos modes de scrutin et qui remet en cause deux principes qui devraient pourtant guider nos pas en matière de modes d'élection : celui du pluralisme démocratique et celui de la parité entre les femmes et les hommes.
À l'exception du rétablissement, en 1986, du scrutin majoritaire de circonscription pour les élections législatives, aucune réforme du mode de scrutin n'a été menée, par quelque majorité que ce soit, qui ait pour conséquence aussi flagrante une remise en cause de ces deux principes démocratiques. Vous avez – quand je dis vous je veux dire votre majorité – réformé le mode de scrutin européen et le mode de scrutin régional. Mais vous n'aviez jamais osé jusqu'ici substituer à une représentation proportionnelle de liste corrigée d'une prime majoritaire un scrutin aussi injuste que peut l'être le scrutin d'arrondissement.
La parité, qui était officiellement l'une de vos préoccupations, est passée purement et simplement à la trappe.