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Intervention de Jean-Pierre Dufau

Réunion du 3 novembre 2010 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Immigration asile et intégration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Dufau :

Ces prévisions sont établies dans une perspective d'économies budgétaires et elles ne sont pas conformes à la réalité des besoins. Il apparaît que ces apprentissages ne concernent aujourd'hui qu'une minorité des primo-arrivants : 22,3 %. De plus, le taux de réussite aux examens est plutôt mitigé : 55 %, alors que l'objectif, ambitieux, est d'atteindre 70 % en 2013. Chiche ! On annonce une politique ambitieuse à laquelle on ne donne pas les moyens. C'est de la démagogie.

La refonte des dispositifs de financement de la politique française, prévue par l'article 74 du présent projet de loi, présente toute une série d'augmentations des taxes et droits de timbre payables par les immigrants, et ce dans le but de consolider les ressources financières de l'OFII. Les effets attendus de cet article consistent en une augmentation des recettes fiscales de 26 millions d'euros. On y voit plus clair : l'État se désengage et demande aux immigrés de participer de manière croissante, par l'intermédiaire de taxes, à leur intégration. Cela devient intolérable pour les plus démunis.

Lors de l'examen de la dernière loi sur l'immigration, des dispositifs de sanctions financières ont été prévus à l'encontre des employeurs qui auraient recours à une main-d'oeuvre immigrée clandestine. Ne serait-il pas plus pertinent et plus juste d'allouer les fonds récupérés à l'allègement du coût fiscal pour les immigrants et à la promotion d'une politique d'intégration ?

L'action 12 concentre l'essentiel des économies budgétaires qui touchent le programme 104 : 41,9 millions d'euros au PLF 2011, ce qui représente plus de la moitié – 57, 42% exactement – des crédits du programme 104, en baisse de 6 millions d'euros par rapport à 2010, voire 7,5 millions d'euros si l'on décompte les fonds précédemment affectés à l'aide au retour et à la réinsertion.

Dans cette ligne budgétaire est prévu le financement pour partie des dépenses de fonctionnement de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration, à hauteur de 2,85 millions d'euros, ce qui représente 42 % des subventions allouées par l'État à cet établissement, le reste provenant d'autres ministères, notamment celui de la culture.

Ne serait-il pas opportun de diminuer la contribution du ministère de l'immigration dans cette subvention de fonctionnement, afin d'augmenter la participation concrète à l'action d'intégration des immigrants réels dans notre pays ?

Les actions de promotion sociale et professionnelle des immigrants passent à la fois par des dispositifs nationaux – 10 millions d'euros –, comme le soutien aux associations qui s'occupent d'intégration et des dispositifs spécifiques en faveur de certaines populations, et par des dispositifs déconcentrés dont le montant est de 17 millions d'euros. En effet, depuis 2009, les préfets sont chargés de ces missions qui incluent notamment la formation linguistique des immigrés déjà installés au niveau local et un certain nombre d'autres dispositions.

Les foyers de travailleurs immigrés reçoivent une dotation en baisse : 12 millions d'euros, contre 12,745 millions d'euros en 2010. Cette allocation intègre la rénovation du bâti. Que restera-t-il pour le fonctionnement ? Les coupes sont drastiques et manquent de précision et de transparence dans les actions menées. Cela est vrai tant au niveau national qu'au niveau déconcentré, avec le chevauchement de certaines prérogatives dévolues aux préfets ou à d'autres organismes, ce qui compromet gravement l'efficacité et la pertinence des mesures prises dans le contexte d'économies que nous connaissons.

En ce qui concerne l'action 14 « Naturalisation et accès à la nationalité », en 2009, 93 833 étrangers ont sollicité une naturalisation par décret, et 25 899 en raison de leur mariage avec un conjoint français, soit au total 108 303 personnes.

La déconcentration vers les préfectures de l'instruction des demandes et décisions défavorables s'est achevée en juillet 2010. Elle a pour but de simplifier la procédure et de réduire les délais de traitement. L'intention est louable, mais c'est encore l'inconnu en matière budgétaire : on avance à l'aveugle, car on ne sait pas combien cela va coûter.

Alors que la sous-direction de l'accès à la nationalité française de votre ministère ne gère plus que les recours hiérarchiques et contentieux, elle bénéficie de 1,9 million d'euros pour fonctionner, contre 2 millions l'année précédente. Et encore, une partie des frais de personnel et informatique de cette même sous-direction est inscrite au programme 303. Bonjour la lisibilité !

Sur l'action 15 « Actions d'intégration des réfugiés », au 31 décembre 2009, la population placée sous la protection de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, est estimée à 152 442 personnes, hors mineurs accompagnants, soit une hausse de 51,2 % par rapport à 2003. Vingt-huit centres provisoires d'hébergement ont pour mission de préparer l'insertion des réfugiés admis en France au titre de la convention de Genève. Leur capacité d'accueil totale est aujourd'hui de 1 083 places. Ce chiffre reste stable depuis quelques années. Sera-t-il suffisant ?

Le Gouvernement a choisi de privilégier la prise en charge des réfugiés par des dispositifs de droit commun pour réserver l'accueil dans ces centres à des personnes souffrant de difficultés d'insertion résultant de traumatismes graves.

Ainsi, les crédits alloués à ces centres baissent : ils passent de 12,7 millions d'euros en 2010 à 12,5 millions d'euros en 2011. De même, pour l'ensemble des aides distribuées par des associations aux réfugiés et pour le financement des interventions en faveur de leur promotion sociale et professionnelle, le ministère prévoit une dotation en baisse : 2,23 millions d'euros en 2011, contre 2,4 millions en 2010.

C'est donc le Fonds européen pour les réfugiés, ou FER, qui devrait apporter un fonds de concours de 2,76 millions d'euros correspondant au premier acompte dû au titre du FER pour 2011 et à la part rattachée au programme 104. Ainsi, dans l'action d'intégration des réfugiés, le Gouvernement s'en remet aux dispositifs de droit commun comme le RSA, financé par les départements, pour pallier les carences du système et le manque de budget alloué à ce secteur. C'est une politique de défausse budgétaire.

Même si nous savons les difficultés financières du pays que vous gouvernez depuis huit ans, nous ne pouvons pas cautionner vos choix budgétaires qui traduisent une politique que nous combattons. En matière d'immigration, d'identité, d'accueil et d'asile, les moyens ne permettent pas la mise en oeuvre d'une politique adaptée, dimensionnée aux besoins et en accord avec la tradition française qui a souvent été évoquée ce matin.

L'opacité, le flou, voire l'acrobatie des imputations budgétaires ne trompent personne. Le groupe socialiste votera contre vos propositions qui aggravent et pénalisent, y compris pécuniairement, la situation des immigrés, notamment les plus pauvres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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