Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, le projet de budget européen pour 2011, adopté par les ministres du budget en conseil Écofin cet été, est en augmentation très modérée, quasiment nulle en crédits d'engagement – 0,2 % – et, pour les crédits de paiement, bien plus réaliste – 2,9 % – que ce qu'avait proposé la Commission européenne. Sur la base de ce projet, la contribution versée par le budget français devrait s'élever, en 2011, à environ 18,2 milliards d'euros.
Le gouvernement français avait, dans la négociation, deux préoccupations principales : limiter la hausse globale du budget de l'Union et rechercher les possibilités d'économies dans chaque rubrique en veillant à ce que l'essentiel des coupes ne porte pas sur les dépenses de la PAC. La France a obtenu satisfaction sur ces deux points.
La négociation budgétaire européenne présente cette année un intérêt particulier, mais elle s'est engagée dans des conditions très difficiles, pour trois raisons.
Tout d'abord, l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne a des conséquences importantes, tant sur la procédure d'élaboration du budget que sur son contenu. Le traité transforme en effet profondément la procédure budgétaire de l'Union en accélérant le calendrier, avec une seule lecture au Conseil et au Parlement européen, et en augmentant les pouvoirs de celui-ci. De plus, il crée de nouvelles compétences et de nouveaux instruments, en particulier le service européen d'action extérieure que le budget pour 2011 va doter des moyens de sa mise en place effective.
Deuxième difficulté : le contexte économique rend l'exigence de discipline budgétaire encore plus impérative que les années précédentes, mais aussi plus difficile à respecter face aux défis que doivent relever tant les États membres que l'Union européenne pour parvenir à poser les bases d'une croissance économique durable. Le Parlement européen, qui fait habituellement pression sur le Conseil pour se rapprocher le plus possible des propositions d'augmentation de la Commission, fait preuve cette année d'une attitude lucide et responsable en reconnaissant que le contexte économique et la situation très lourdement contrainte des finances publiques excluent toute augmentation significative du budget européen.
Enfin, la négociation du budget annuel se trouve imbriquée dans un chantier plus vaste, celui de la réforme d'ensemble du système budgétaire communautaire, chantier qui sera lui-même immédiatement suivi par l'ouverture des négociations sur les montants du cadre financier pluriannuel post-2013.
Il est pertinent d'avoir regroupé le débat annuel sur le prélèvement destiné au budget européen et le débat préalable au Conseil européen. En effet, la question de l'avenir du budget européen doit être partie intégrante de la réflexion sur la mise en place d'un gouvernement économique européen, réflexion qui va progresser lors de ce sommet avec la présentation du rapport du groupe de travail présidé par M. Herman Van Rompuy.
En parallèle se développe un débat sur l'avenir du budget européen et sur le renforcement de la coordination des politiques budgétaires nationales avec, en dénominateur commun, la stratégie « Europe 2020 », dont les budgets, tant européen que nationaux, seront des instruments essentiels. Notre assemblée doit s'impliquer pleinement dans ce double processus, crucial pour donner une nouvelle impulsion et une crédibilité renouvelée à l'Union européenne.
Le budget européen pour 2011, au-delà de la question habituelle de son montant, va servir de référence pour la réforme budgétaire, dont la négociation va enfin pouvoir commencer sur la base de la communication présentée par la Commission européenne le 19 octobre dernier. Le débat sur l'évolution relative des dépenses du budget européen va surtout avoir lieu lorsque commenceront, au second semestre 2011, les négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel. Mais, dans l'intervalle, il est indispensable de nous saisir du problème du financement du budget européen, c'est-à-dire du volet « recettes » – comme nous l'avons déjà fait au sein de la commission des affaires européennes, excellemment présidée par M. Pierre Lequiller.
En effet, ce financement a perdu, au fil du temps, toute légitimité, toute lisibilité, toute pertinence. Le système actuel est opaque, inéquitable, et là-dessus le consensus est général en Europe. Les rabais et corrections, les rabais sur le rabais, l'obsession des États pour le juste retour au détriment de l'intérêt commun européen et d'une bonne complémentarité entre budgets nationaux et européen, tout cela dénature chaque année la discussion budgétaire. Les citoyens ne pourront être durablement reconquis à l'idée européenne que si nous parvenons à créer un système équitable, transparent, démontrant l'irremplaçable valeur ajoutée de l'Europe dans des projets concrets clairement visibles dans nos régions et dans nos déplacements quotidiens, dans l'activité de nos entreprises, dans notre rôle collectif dans le monde et dans les pratiques de consommation de chacun d'entre nous.
Il n'est pas question de plaider, dans les circonstances actuelles, pour un doublement ou un triplement en volume du budget européen. Une telle entreprise serait vouée à l'échec, et contradictoire avec l'assainissement des finances publiques nationales exigé par nos engagements européens. Mais l'introduction d'au moins une véritable ressource propre, clairement identifiable par les citoyens, pour réduire d'autant la dépendance du budget européen vis-à-vis des contributions nationales comme celle que nous allons voter aujourd'hui, est urgente et indispensable. Cette ressource propre pourrait permettre, si elle était basée sur une activité économique dynamique, une légère augmentation du budget sans compromettre la nécessaire discipline budgétaire nationale.
Toutes les options techniques possibles méritent d'être pesées, notamment celles présentées par notre collègue du Parlement européen Alain Lamassoure, dont je salue le souci constant d'associer Parlement européen et parlements nationaux dans cette vaste réforme qui est un enjeu pour l'existence et le sens même de l'Union européenne dans les années à venir. La commission des affaires européennes va y apporter sa part. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)