À la lumière des attaques contre notre monnaie en 2010, ces disciplines sont devenues indispensables.
Ayons la franchise de dire que, depuis le traité de Maastricht, en 1993, vingt-deux cas d'infraction ont été répertoriés, mais jamais le mécanisme de sanctions prévu dans le traité n'a été mis en place.
Pour la crédibilité de notre zone monétaire, un renforcement de nos disciplines communes est jugé indispensable, aussi bien par l'Allemagne que par la France. Il y va de l'intérêt national comme de l'intérêt de l'Europe.
Je veux dire la gratitude du gouvernement français à l'égard de Herman Van Rompuy qui, mandaté par les chefs d'État et de gouvernement, a su, en cinq mois à peine, et deux mois avant la fin du délai imparti, présenter à l'Union un ensemble de règles solides, rigoureuses et politiquement fondées.
Cet ensemble se distingue des propositions de la Commission, rendues publiques le 29 septembre. La Commission proposait un système de sanctions quasi-automatiques susceptibles d'être imposées aux États membres et fondées sur des critères purement statistiques. Ces propositions, mesdames et messieurs les députés, posaient plusieurs problèmes à nos yeux.
En premier lieu, la Commission ne faisait aucune distinction entre le volet préventif et le volet correctif du pacte, et proposait une application généralisée du nouveau mécanisme automatique de sanctions.
En deuxième lieu, les règles proposées étaient beaucoup trop rigides et condamnaient par avance toute autonomie budgétaire des États membres.
Enfin et surtout, ces propositions réécrivaient l'équilibre prévu dans le traité, faisant du Conseil, sur proposition de la Commission, l'organe chargé de décider d'imposer des sanctions, aux termes de l'article 126 du traité.
Dans la version proposée par la Commission, celle-ci devenait à la fois le juge, l'arbitre et l'organe de sanction.
Dans cette perspective, une sanction d'une sévérité sans précédent – des amendes susceptibles d'atteindre 0,2 % du PNB de l'État membre concerné, soit 4 milliards d'euros pour la France ! – pouvait être imposée à un État sans qu'aucune majorité d'États membres ou de population l'ait décidé, sur la base d'une décision de la Commission qui, dans une hypothèse limite, pouvait être soutenue par une quinzaine de commissaires représentant moins de 14 % de la population européenne.
Mesdames et messieurs les députés, ceci n'était acceptable ni pour le Gouvernement ni pour le Parlement. Dans ces conditions, la déclaration franco-allemande de Deauville et les conclusions de la task force Van Rompuy rétablissent les grands équilibres politiques, tout en renforçant la gamme des sanctions, tant en ce qui concerne le volet préventif que le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance.
S'agissant du volet préventif du pacte, le système proposé par la France et par l'Allemagne ainsi que par le groupe Van Rompuy prévoit que ce soit le Conseil – et non la Commission – qui prenne la décision d'imposer, à la majorité qualifiée et de manière progressive, des sanctions qui pourraient prendre la forme de dépôts portant intérêt.
S'agissant du volet correctif du pacte, la France et l'Allemagne, de même que le groupe Van Rompuy, s'accordent sur la nécessité de sanctions systématiques, mais selon une procédure en deux temps : dans un premier temps, le Conseil décide à la majorité qualifiée d'ouvrir une procédure de déficit excessif ; et c'est seulement si l'État n'a pas pris les mesures correctrices nécessaires dans un délai de six mois que la procédure de sanction est activée.
Le grand apport de la déclaration de Deauville et du groupe Van Rompuy a donc été de remettre le Conseil au coeur du processus et d'introduire dans la procédure de sanction, qu'elle concerne le volet préventif ou correctif, le principe d'une appréciation qui reste fondamentalement politique, tout en élargissant de façon très sérieuse les disciplines appliquées aux États.
À ces disciplines nouvelles, les dirigeants français et allemand ont ajouté à Deauville un autre volet essentiel, qui doit être considéré comme une partie intégrante du paquet proposé, à savoir la révision du traité, afin de permettre deux avancées considérables :
Premièrement, la pérennisation dans le traité du mécanisme européen de stabilisation, embryon du futur « fonds monétaire européen » créé au mois de mai dernier après la crise de l'Euro – je rappelle en effet que le mécanisme financier mis en place ce printemps avait un caractère transitoire et une durée de trois ans ;
Deuxièmement, une évolution vers des sanctions politiques, avec la suspension des droits de vote de l'État concerné : nous pensons en effet que des sanctions efficaces ne consistent pas seulement à ajouter des pénalités financières à des États déjà en difficulté de trésorerie, mais doivent être de nature politique, susceptibles d'ouvrir un débat entre les États membres et à l'intérieur de l'État concerné.