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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 18 octobre 2010 à 16h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

En effet ! Pour nous, la taxation du stock de capital ne saurait être remplacée par les mesures que vous proposez. Nous aurons encore ce débat pendant quelques mois ou plus.

Ensuite, on a vu revenir la TVA sociale sous le nom de TVA anti-délocalisations. On voit bien où vous voulez en venir.

L'impôt le plus facile à augmenter, c'est la TVA. Comme vous n'avez pas le courage de prendre les mesures fiscales qui permettraient de réintroduire de la justice dans notre fiscalité, vous prenez prétexte de la lutte contre les délocalisations pour augmenter cette taxe, dont nous savons qu'elle pèse sur la consommation, donc principalement sur le revenu des plus modestes, qui épargnent peu ou pas du tout.

Si vous souhaitez lutter contre les délocalisations, il existe une solution, celle que préconise le parti socialiste avec le « juste échange ». Il n'y a aucune raison d'accepter, en Europe – il s'agit d'un sujet européen –, des importations de produits ne respectant ni les critères environnementaux ni les critères sociaux. Assujettissons ces produits à des contributions ; nous rendrons ainsi la mondialisation plus responsable. Ce n'est pas du tout du protectionnisme : il s'agit de tirer la mondialisation vers le haut, et cela répondrait, en partie, au problème des délocalisations.

En ces temps de doute, il existe au moins une certitude : en 2012, après dix ans de pouvoir de droite, votre bilan économique et social se résumera en trois points : explosion de la dette, explosion du chômage, explosion des inégalités.

En dix ans, la dette aura doublé. Si nous exprimons en valeur vos propres prévisions pour 2012, données en pourcentages, la dette sera de 1 800 milliards d'euros. En juin 2002, elle était d'un peu moins de 900 milliards. Vous aurez donc doublé la dette de notre pays.

Les charges d'intérêt de cette dette représenteront chaque année, pour les générations futures, plus de 50 milliards d'euros, c'est-à-dire un des plus gros budgets, mais aussi plus que le déficit à venir des retraites. Quand vous affirmez qu'il est urgent de réformer les retraites, pour ne pas laisser de dettes aux générations futures, je crois qu'il ne faut pas oublier ce que vous laissez en termes de dettes et qui est tout à fait considérable.

Votre réforme des retraites fait payer la crise aux salariés les plus modestes. Nous savons très bien que le déficit de notre système des retraites s'est creusé et que cette situation appelle une réforme. Toutefois, le problème n'est pas dû à des considérations démographiques, même si vous le répétez tous les jours. Non que la démographie ne compte pas dans les retraites – tout le monde sait que l'espérance de vie a augmenté –, mais elle a été déjà complètement prise en compte jusqu'en 2020 par la réforme de 2003, qui augmente la durée de cotisation en fonction de l'espérance de vie.

Si le déficit s'est creusé, ce n'est donc pas en raison d'un changement dans la situation démographique : la prévision démographique n'a pas changé et reste valable. La raison, c'est que l'emploi n'a pas augmenté comme prévu, parce que vous n'avez pas mené une politique de l'emploi suffisante au cours de ces dix dernières années. C'est aussi, bien sûr, à cause de la crise.

Pour répondre à un tel déficit, il faut intervenir sur ses causes, c'est-à-dire agir sur l'emploi et dégager des recettes nouvelles. Il ne saurait être question d'ajouter des mesures démographiques incohérentes, que vous prenez pour la seule raison qu'elles ont une action rapide. Passer de soixante à soixante-deux ans, c'est en fait grever d'un impôt supplémentaire le revenu des salariés qui ont déjà leurs annuités et pourraient partir, et qui cotiseront pour rien, ou c'est laisser au chômage des salariés qui auraient pu prendre leur retraite. Vous bouchez un trou en en creusant un autre, dans une sorte de politique du sapeur Camember.

J'évoque les retraites parce que c'est un débat fondamental et que nos concitoyens ont compris que vos mesures étaient injustes. Regardons les deux factures que vous nous présentez aujourd'hui. La réforme des retraites constitue en fait la facture de la crise : vous la faites payer aux salariés modestes, à ceux qui ont commencé à travailler tôt, en épargnant pour l'essentiel les revenus du capital.

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