Je voudrais aussi remarquer qu'au sein des mesures annoncées – et qui, si elles ne les concernent pas toutes, concernent pour partie des niches fiscales – sont considérées comme niches fiscales à la fois les mesures qui constituent officiellement une niche et celles qui n'en constituent plus une.
Autrement dit, il est difficile de dégager une rationalité de l'action publique : on déclasse sans critères avant d'oublier les éventuels critères, et surtout d'oublier le résultat de ce déclassement sans critère. En ces temps budgétaires un peu troublés, un peu plus de simplicité dans le traitement budgétaire, un peu plus de rationalité dans les pratiques ne nuiraient pas à la compréhension, au moins par les parlementaires, des actions conduites.
J'en reviens au raisonnement suivant lequel les réductions de niches fiscales ne seraient pas des hausses d'impôts. Expliquer à quelqu'un qui va payer davantage d'impôts que ce qu'il vit n'est pas une hausse d'impôt, ce sera un peu curieux : je vous laisse le soin, chers collègues qui approuveriez éventuellement ce procédé, de l'expliquer à celles et ceux de vos électeurs qui vous interrogeront à ce sujet !
Je ne vous cache pas préférer ma place à la vôtre, et ce d'autant plus qu'en moins de deux ans, nous avons entendu plusieurs discours sur ces bancs. Mes chers collègues, pourrais-je rappeler que l'année dernière, dans la loi de finances – à l'initiative du président du groupe UMP Jean-François Copé mais avec l'accord des ministres présents au banc – fut supprimée une mesure alors considérée comme une niche fiscale ? Jusqu'à l'an dernier, en effet, les indemnités journalières des accidentés du travail n'étaient pas fiscalisées.
Dans le cadre de la « moralisation » des dispositifs fiscaux – le terme fut utilisé – il fut décidé qu'il fallait supprimer cette niche fiscale-là. Elle le fut donc, à la suite d'un vote majoritaire du groupe UMP, même si certains à l'époque ont pu penser, et dire, que s'il s'agissait vraiment de diminuer les quelque 486 niches fiscales officiellement recensées, alors il y avait sans doute d'autres urgences.
Mais à cette occasion fut tenu un discours en exacte contradiction avec celui que nous entendons aujourd'hui ! Si la réduction de niche fiscale ne doit plus aujourd'hui être considérée comme une hausse d'impôt, c'est, nous dit-on, au motif qu'un contribuable utiliserait tel ou tel dispositif de façon volontaire ; dès lors, si ce dispositif était réduit, le contribuable ne pouvait être considéré comme victime d'une hausse d'impôts. Si vraiment ce raisonnement est juste, il faudra alors, mes chers collègues, m'expliquer en quoi et comment les accidentés du travail ont choisi leur sort ! La comparaison de ces deux discours – tenus à une année d'intervalle seulement – est cruelle.
Donc les impôts augmentent ; ils augmentent notamment par la réduction des niches, mais pas uniquement : le projet de loi de finances comporte onze hausses d'impôts et nouvelles impositions, pour plus de 3 milliards d'euros. Que je sache, madame la ministre, monsieur le ministre, augmenter l'impôt sur le revenu de 40 à 41 %, ce n'est pas réduire une niche fiscale ; et prétendre que ce n'est pas une augmentation d'impôt serait tout de même, si vous me passez l'expression, un petit peu fort de café. Augmenter la taxation des plus-values mobilières et immobilières, c'est évidemment augmenter les impôts. Augmenter le prélèvement forfaitaire à 17 %, c'est évidemment augmenter les impôts. Augmenter la TVA sur les offres triple play, c'est évidemment augmenter les impôts ! Je pourrais continuer la lecture de cette liste, mais je prendrais le risque de vous lasser.