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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 18 octobre 2010 à 16h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Discussion commune

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

…je réponds que nous avons surtout privilégié l'épargne des Français.

Depuis le discours du Président de la République à Toulon, nous avons veillé à ce que ni l'épargne des Français ni leur confiance dans la capacité des banques à financer l'économie ne soient entamées. Certes, pour ce faire, nous avons dû mobiliser des fonds, mais à ce jour ils ont été remboursés à 80 %, et ils ont procuré à l'État un revenu de 2,4 milliards d'euros.

Enfin, à ceux qui nous disaient : « Vous n'avez pas soutenu la consommation des ménages », je rappelle que près d'un tiers des dépenses du plan de relance – c'est-à-dire 14 milliards d'euros sur 45 milliards pour 2009 et 2010 – a concerné les ménages, ce qui représente, selon les calculs du FMI, 1 000 euros de pouvoir d'achat supplémentaire en moyenne – sachant tous les inconvénients du raisonnement statistique en moyenne – pour chaque ménage français. Résultat : la France a mieux traversé la crise que ses partenaires. La croissance a été négative en 2009, mais seulement de 2,6 %, alors que, pendant la même période, l'Allemagne a connu une croissance négative de 4,7 %.

Au-delà des indicateurs à caractère strictement économique, j'ai toujours dit qu'en matière de politique économique, nous ne saurions si nous avions réussi qu'en constatant l'augmentation nette de l'emploi en France. Or depuis le début de l'année 2010, la France a créé pas moins de 60 000 emplois nets, portant ainsi le taux de chômage d'un pic de 9,6 %, selon les méthodes de calcul du Bureau international du travail, à 9,3 % selon le calcul actuel de l'INSEE.

Nous avons plus particulièrement consacré notre action à lutter contre le chômage des jeunes. Entre avril 2010 et avril 2009, le nombre d'inscrits à Pôle emploi de moins de vingt-cinq ans a baissé de 5 %. Le chômage des jeunes est une des plaies de notre époque, ce n'est donc pas suffisant ; au moins concentrons-nous nos efforts sur ce fléau.

La politique de relance a donc porté ses fruits.

Pour 2011, nous avons trois priorités qui sont liées les unes aux autres. Il s'agit de l'emploi, première préoccupation de nos concitoyens, de la baisse impérative des déficits publics,décrite par François Baroin comme une ardente obligation car c'est la condition absolue d'une relance de l'économie, et de la compétitivité des entreprises, car il n'y aura ni investissements ni créations d'emplois en France si les entreprises ne sont pas compétitives.

Au-delà de ses multiples effets, la crise la plus brutale que nos économies aient subie a eu trois conséquences majeures.

D'abord, le chômage a frappé la plupart des économies de la planète. Son augmentation parfois brutale et durable – certains pays, comme les États-Unis, n'y étaient pas habitués – n'a été évité par d'autres, telle l'Allemagne, que grâce à des politiques sociales extrêmement actives et, surtout, à un socle de relations sociales qui a permis la conclusion d'accords au sein des entreprises.

Ensuite, l'endettement public a fortement crû en Europe – plus de 20 points de PIB –, et plus encore aux États-Unis, pour des raisons manifestes de « privilège de la monnaie » – plus 40 points.

Enfin, le centre de gravité de l'économie mondiale s'est déplacé vers l'Est : la Chine est ainsi devenue la deuxième puissance économique avec un PIB deux fois supérieur au nôtre, et elle devrait conserver au cours des prochaines années un rythme de croissance rapide, même si mon homologue chinois qualifie de mauvaises prévisions de croissance un rythme de 9 % en les comparant au 11 % actuels.

La sortie de crise nous offre la possibilité de résorber ces trois déséquilibres : nous pouvons faire baisser le chômage, réduire les déficits, et rééquilibrer la concurrence mondiale tant dans le cadre budgétaire que dans un cadre européen bien compris.

Pour y parvenir, la France ne manque pas d'atouts. Sa demande intérieure est restée dynamique : aucun trimestre n'a enregistré de baisse de la consommation depuis le début de la crise. Son territoire reste attractif pour les investisseurs, et la demande mondiale qui lui est adressée devrait augmenter de 11,8 % en 2010, et de 7,7 % en 2011 – cela, si et seulement si, nous proposons une offre qui reste attractive. L'inflation y est maîtrisée : la prévision fixée à 1,5 % pour 2010 est une bonne nouvelle pour les ménages. Sa signature d'émetteur souverain a jusqu'ici été préservée sur les marchés en « triple A », et ses opérateurs privés ont maintenu leur capacité d'endettement, à la différence des opérateurs privés d'autres pays. J'ajoute que la capacité de la France à se financer et à se refinancer est intacte, aussi bien avec des instruments de court que de long terme.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que sa démographie est extrêmement favorable, avec le deuxième niveau de fécondité d'Europe derrière l'Irlande, et que sa croissance est bien orientée puisque, dans le projet de loi de finances, nous tablons sur une progression du PIB de 1,5 % en 2010, que le Premier ministre a révisé à 1,6 %. Pour l'année 2011, nos prévoyons une croissance de 2 %, ce qui est loin d'être déraisonnable. En effet, en rythme annuel, depuis le début de l'année 2010, la croissance française est déjà presque de 2 %. Dès lors que la demande mondiale continue d'augmenter et que nous sommes capables de maintenir les facteurs d'attractivité de notre pays, il n'y a en conséquence aucune raison pour que nous ne soyons pas en mesure de maintenir le rythme actuel de la croissance.

Venons-en à nos priorités. La première d'entre elles consiste à créer de l'emploi : c'est un impératif.

Notre objectif est de ramener le chômage à son niveau d'avant la crise, avant la fin de l'année 2012. Cela n'est sans doute pas particulièrement brillant – l'Allemagne fait mieux –, mais c'est déjà beaucoup mieux que tous les résultats que nous avons obtenus depuis longtemps.

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