Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. (« Elle n'est pas là ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Les Français sont très attachés au livret A, pour une raison simple : depuis 190 ans, l'argent qu'ils y déposent est sécurisé grâce à sa centralisation auprès de la Caisse des dépôts. Mais les banques françaises ont déposé un recours devant la Commission européenne pour dénoncer le monopole de sa distribution. La Commission réclame donc la « banalisation » du livret A, ce qui signifie qu'il pourra être distribué par l'ensemble des banques.
On pourrait juger intéressante une telle mesure. Mais il est à craindre que les banques s'évertuent à proposer des produits de substitution à leurs clients – en particulier à ceux dont le livret est le mieux garni –, à des taux plus intéressants, ce qui les dissuadera de placer plus longtemps leur épargne dans les livrets A. Or ce que les Français savent peu, c'est que l'argent collecté par ce biais bénéficie au logement social, dont 70 % est financé par la Caisse des dépôts et consignations – de même que la rénovation des villes et des quartiers ou les transports collectifs en site propre. Tout cela grâce au livret A !
Si les épargnants les plus aisés se tournent vers d'autres types de placement, l'usage du livret A sera limité aux familles modestes, qui ont besoin d'une épargne liquide, c'est-à-dire d'un argent disponible à tout moment. Dès lors, la France ne pourra plus investir sur trente ou quarante ans comme le dispositif actuel permet de le faire. Or les investissements réalisés dans nos villes ont une rentabilité à très long terme.
Les membres du groupe socialiste, très attachés, comme certains de leurs collègues sur d'autres bancs, à la pérennité de ce dispositif, demandent donc au Gouvernement de dire quelles sont ses intentions réelles.
Vous avez déposé un recours contre la décision de la Commission, mais le Président de la République s'est prononcé pour la banalisation du livret A, en contradiction avec l'action du Gouvernement. Allez-vous maintenir ce recours ?
Deuxièmement, la Caisse des dépôts et consignations fait l'objet d'attaques incessantes. Allez-vous maintenir cet établissement dans son rôle d'investisseur à long terme ? De nombreuses places financières s'en féliciteraient, car travailler uniquement sur le court terme n'est pas une façon d'amortir les effets de la crise financière mondiale.
Répondez à ces questions, car toutes les organisations de logement social sont inquiètes. Ne touchez pas à notre livret A ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ainsi que sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)