Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, immigration, intégration et nationalité : ces mots suffisent souvent, d'un côté de cet hémicycle et de l'autre, à déchaîner l'orage des anathèmes et des caricatures. On vient de le constater à l'instant.
Au terme de deux semaines de débats âpres et passionnés, parfois trop, d'ailleurs, il est un besoin que nul ne peut nier : celui de doter notre pays d'une politique d'immigration à la fois juste et efficace. Cette politique doit être juste, car, fidèle à ses traditions comme à son histoire, la France est et restera une terre d'accueil pour les réfugiés. Elle doit être efficace, car le vieillissement de notre population nous impose d'intégrer à notre société de nouveaux travailleurs, tout en luttant avec fermeté contre le travail clandestin, et plus fermement encore contre les filières d'immigration clandestine. Fallait-il pour autant discuter de ce qui s'apparente bien à un énième projet de loi sur cette question ?
Le premier élément de réponse tient à ce qui constitue à nos yeux le principal apport de ce texte : depuis 2007, c'est une véritable révolution qui a eu lieu dans notre politique migratoire avec la montée en puissance de l'Union européenne. Dès lors que les frontières intérieures ont été abolies au sein de l'Union, une gestion purement nationale des flux migratoires est nécessairement condamnée à l'échec. Dans la foulée du pacte européen pour l'immigration et l'asile, adopté sous la présidence française et à l'unanimité des États membres, les trois directives que nous transposons aujourd'hui dans notre droit interne constituent l'embryon d'une politique commune. Nous mesurons le chemin qui reste à parcourir, mais nous constatons surtout les étapes essentielles franchies sur la voie de la consolidation de l'espace Schengen.
Je reviens un instant sur deux dispositions qui ont entraîné de longs débats au sein de notre groupe. Je pense, en premier lieu, aux titres de séjour délivrés pour cause de maladie grave. Ce texte marque indéniablement, pour un certain nombre d'entre nous, un recul des droits des étrangers sans titre, mais en outre il dégrade l'image de notre pays.
Je pense en second lieu à la question si débattue, bien qu'en réalité purement symbolique, de l'extension à certains crimes du champ de la procédure de déchéance de nationalité. À nos yeux, cette disposition doit être le symbole de l'attachement indéfectible de la République à ses forces de l'ordre, notre engagement à les soutenir et à les protéger à l'heure où certains n'hésitent plus, désormais, à leur envoyer des menaces de mort. Ce qui nous interroge toutefois, et ce qui choque certains d'entre nous, c'est cette inégalité de fait qu'elle crée entre les fils naturels et les enfants adoptifs de la République.
Ces deux dispositions, mes chers collègues, nous empêchent d'être unanimes à soutenir ce projet de loi. C'est néanmoins une majorité des députés du groupe Nouveau Centre qui lui apportera son soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)