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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 5 octobre 2010 à 15h00
Immigration intégration et nationalité — Article 17 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

L'article 17 ter est d'une exceptionnelle gravité, M. Pinte l'a souligné, dans la mesure où il fait de l'existence d'un traitement la condition sine qua non pour l'obtention du titre de séjour « soins médicaux » en France. Il s'agit en fait d'un amendement que M. Mariani a introduit au cours de la discussion en commission – alors que le Gouvernement n'y avait peut-être pas songé jusque-là –, ayant fait la pénible découverte de la jurisprudence plus favorable du Conseil d'État, datée du 7 avril 2010 et selon laquelle, si le traitement n'est pas accessible dans son pays d'origine, la personne est autorisée à se soigner en France.

Entrons dans le détail et attachons-nous notamment au mot « inaccessible » d'un point de vue casuistique. Bien évidemment, tous les traitements sont accessibles dans tous les pays du monde. À l'heure de la mondialisation des connaissances médicales et pharmaceutiques, même dans le plus pauvre des 182 pays, vous trouverez, dans une pharmacie, dans une clinique privée, dans un hôpital –rarement public, plutôt un de ceux réservés aux dirigeants, à l'élite ou à ceux qui peuvent payer – tous les traitements accessibles dans les pays développés. N'importe quelle pharmacie officielle d'Afrique peut vous proposer tous les médicaments essentiels, même si c'est en petites quantités. Mais si vous demandez au pharmacien qui peut y avoir accès, il vous répondra qu'ils sont très peu : les expatriés, les gens qui ont des moyens, les membres du palais présidentiel. En posant, donc, comme condition que le traitement existe dans le pays d'origine, vous n'aurez plus personne ici.

Une interprétation large ne signifierait pas non plus que tout le monde pourrait venir se faire soigner dans notre pays. D'autant que la pratique est extraordinairement contrôlée. Toute personne demandant un titre de séjour pour être soignée doit fournir un certificat médical, mais pas un certificat signé par un médecin traitant – ce que, en tant qu'ancien médecin de quartier, je regrette. On exige un certificat, à Paris, d'un chef de service de l'Assistance publique, accompagné d'examens. À Paris toujours, ce dossier médical est ensuite visé par le médecin-chef de la préfecture de police, qui n'a pas la réputation d'être laxiste. Celui-ci fouille dans le détail, regarde les traitements, et même les possibilités en fonction de la ville où habite la personne, car il existe aussi des différences d'accès géographique.

Il ne s'agit donc pas d'un système incontrôlé et incontrôlable que la jurisprudence récente du Conseil d'État permettrait de tourner pour se retrouver avec des centaines de milliers de gens qui viendraient se faire soigner gratuitement en France. Si l'on voulait sous-entendre que les étrangers coûtent très cher à l'assuré social français, ce n'est en tout cas pas ceux-là, puisque ces titres de séjour particuliers sont examinés avec soin et sévérité, et ne sont pas facilement accessibles.

Ce qui me frappe, comme M. Pinte l'a dit, c'est que l'on va se retrouver en France avec des gens malades qui, ne pouvant pas se faire soigner, resteront dans la clandestinité médicale et, s'ils sont atteints de maladie contagieuse – tuberculose ou affection liée au VIH –, seront plus dangereux que s'ils étaient soignés. L'article va donc totalement à l'encontre d'un but de santé publique ou humaniste, et il risque de nous entraîner dans des difficultés incommensurables du point de vue de la santé publique.

Je considère, monsieur le président, avoir défendu notre amendement de suppression.

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