J'ai déposé un amendement de suppression de cet article relatif à la zone d'attente. La notion est attachée à la zone d'accès réservée dans les ports, les aéroports et les gares ouvertes au trafic international hors Schengen.
L'article 6 a été créé à la suite de l'arrivée de 123 personnes d'origine kurde, apatrides puisque ne bénéficiant pas de la nationalité syrienne bien que venant de Syrie. Apparues sur une route de Corse, ces personnes ont été conduites dans un gymnase de la ville de Bonifacio où elles sont restées sous la garde des gendarmes pendant plusieurs heures, avant d'être transférées vers des centres de rétention en France métropolitaine. Les juges de la liberté et de la détention saisis quelques jours plus tard ont libéré l'ensemble de ces personnes, considérant qu'elles avaient été illégalement privées de liberté.
La notion de « groupe d'étrangers » a été précisée par un amendement de notre rapporteur : il s'agit d'un groupe d'au moins dix étrangers. Nous sommes malheureusement loin du « nombre exceptionnellement élevé d'étrangers » prévu par la directive « retour ». J'y reviendrai.
L'article, confusément, crée une indistinction entre la zone d'attente et le territoire puisqu'il permet de ramener en zone d'attente, en deçà du contrôle aux frontières, des personnes qui sont déjà entrées, certes irrégulièrement, sur le territoire national.
Or, selon qu'une personne est entrée irrégulièrement sur le territoire national ou qu'elle est placée en zone d'attente, ses droits diffèrent.
En présence d'une demande d'asile, en zone d'attente, les personnes peuvent être privées de liberté le temps de l'examen de leur demande par le ministre de l'immigration. Si leur demande est rejetée, elles peuvent être renvoyées dans leurs pays de provenance ou d'origine sous réserve d'un recours suspensif dans le délai de quarante-huit heures auprès du tribunal administratif – en l'occurrence celui de Paris puisque c'est, en général, de la zone d'attente de Roissy que relèvent ces personnes –, sans qu'elles puissent déposer une demande d'asile auprès de l'OFPRA.
Si elles se trouvent, au contraire, sur le territoire français, elles peuvent déposer une demande d'asile auprès de l'OFPRA. En l'absence de demande d'asile, si elles sont replacées en zone d'attente, il peut leur être notifié un refus d'entrée, exécutoire d'office sauf si la personne demande à bénéficier d'un jour franc, mais sans possibilité d'un recours suspensif. Si l'on considère qu'elles sont entrées irrégulièrement, il est possible de leur notifier une mesure d'éloignement qui, elle, en revanche, peut faire l'objet d'un recours suspensif devant le tribunal administratif.
J'ai deux questions à poser à M. le ministre. En ce qui concerne le cas qui nous préoccupe, celui des 123 Kurdes arrivés sur le territoire corse, ces personnes ont été dispersées dans plusieurs centres de rétention en métropole. Pourquoi ne pas les avoir regroupées, soit à Marseille soit à Nice, ce qui aurait rendu leur défense plus facile ? La présence d'interprètes était en effet requise et, de même, il aurait été plus simple, sur le plan judiciaire, de les traiter individuellement mais regroupées sur un même site.
Ensuite, pourquoi un groupe d'au moins dix étrangers ? Pourquoi pas neuf, quinze ou vingt ? La directive « retour » parle d'un « nombre exceptionnellement élevé d'étrangers ». Je souhaiterais des précisions de la part du Gouvernement pour savoir à partir de quel seuil un nombre peut être considéré comme « exceptionnellement élevé », car cela me paraît assez subjectif.