Monsieur le président, monsieur le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l'article 3 ter vise à porter à trois ans les délais fixés par le code civil pour la mise en oeuvre de la procédure de retrait de nationalité, de manière à permettre à l'administration de s'assurer plus efficacement du respect par les accédants à la nationalité française des conditions légales et des conditions de moralité requises par la loi.
L'article 27, alinéa 2, du code civil donne au Gouvernement la possibilité de rapporter dans certains cas, limitativement énumérés, les décrets de naturalisation ou de réintégration. Un tel décret peut être rapporté sur avis conforme du Conseil d'État, dans les douze mois suivant sa publication pour défaut de conditions légales ou les vingt-quatre mois suivant la découverte d'une infraction, selon les cas. Cette décision est rétroactive. L'intéressé et éventuellement les enfants qui ont bénéficié de l'effet collectif sont censés n'avoir jamais été Français. Cette possibilité est destinée à permettre à l'administration de rattraper une erreur importante ou de revenir sur une décision qui semble a posteriori infondée.
Le Conseil d'État a précisé que, pour justifier une mesure de retrait, une erreur ou une fraude ne suffit pas. En l'espèce, il faut encore que cette erreur ou cette fraude ait entaché l'appréciation qui a pu être portée au moment de conférer la nationalité. Ainsi, deux cas de figure sont actuellement prévus par le code civil.
Premièrement, lorsque le demandeur ne remplit pas les conditions légales et que sa demande aurait pu être déclarée irrecevable. Ont été admis à ce titre des retraits dus à une condamnation pénale postérieure au décret pour des faits antérieurs à celui-ci. Dans le cas du défaut de résidence en France, du fait de la présence d'un conjoint à l'étranger ou du fait d'une résidence à l'étranger depuis plus d'un an, alors que l'intéressé soutient que le motif de cette présence est l'exécution d'un contrat de travail. la décision peut-être rapportée dans le délai d'un an.
Deuxièmement, lorsque la décision de l'autorité publique a été obtenue par mensonge ou par fraude. Cette disposition s'applique dans de nombreux cas, notamment lorsque le demandeur a omis de mentionner certains éléments de sa situation personnelle, comme l'existence d'enfants ou d'un conjoint dans son pays d'origine ou lorsqu'il a produit un faux livret de famille. Le décret peut, dans cette seconde hypothèse, être rapporté dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude.
Entre 2001 et 2009, le Conseil d'État a été saisi chaque année en moyenne de 31 demandes d'avis conforme sur un retrait de décret de naturalisation ou de réintégration. De 2009 jusqu'à la fin du premier semestre 2010, 51 dossiers lui ont été soumis. Parmi ceux-ci, un seul avis de rejet a été émis. Deux avis conformes ont été émis pour défaut des conditions légales prévues à l'article 21-16 du code civil – il s'agit de personnes ayant quitté la France à la date de leur naturalisation –, un avis conforme pour défaut des conditions légales prévues à l'article 21-23 du code civil, à savoir défaut de bonnes moeurs avec méconnaissance de la législation du travail. Enfin, 47 avis conformes ont été donnés pour des situations de mensonge ou de fraude. Tous étaient motivés par la dissimulation de la situation matrimoniale ou familiale des postulants, qui aurait fait obstacle à une naturalisation à raison des exigences de l'article 21-16 du code civil : il s'agit de la fixation en France du centre des intérêts du postulant. Deux d'entre eux étaient également motivés par une situation de bigamie, constitutive d'un défaut d'assimilation au sens de l'article 21-24 du code civil.