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Intervention de Jean-Ludovic Silicani

Réunion du 8 septembre 2010 à 10h15
Commission des affaires économiques

Jean-Ludovic Silicani :

Certains députés demandent beaucoup à l'ARCEP, tandis que d'autres – parfois les mêmes – lui reprochent d'intervenir hors de sa compétence… Je prends cela comme un compliment : c'est sans doute parce que l'Autorité a une action efficace que l'on attend beaucoup d'elle. Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons agir que lorsque la loi nous y autorise. Si le Parlement souhaite que nous intervenions davantage sur certains sujets, il doit nous en donner les capacités juridiques.

Je ne pense pas avoir outrepassé mon rôle en exprimant mon avis sur les entreprises du secteur et les charges qui leur incombent. C'est la vocation même d'une autorité de régulation que de s'assurer du bon fonctionnement d'un marché. Elle doit en particulier veiller à ce que règne une certaine concurrence, surtout quand le marché succède à un monopole et comprend un opérateur historique.

À ce propos, on m'a interrogé sur les relations entre l'ARCEP et l'Autorité de la concurrence. L'objectif de cette dernière est de s'assurer qu'une concurrence maximale existe dans tous les secteurs de l'économie. Celui d'une autorité sectorielle comme l'ARCEP est également de veiller au maintien de la concurrence, mais aussi de prendre en compte d'autres intérêts généraux fixés par la loi : accès de l'ensemble de la population à un service, aménagement du territoire, environnement, emploi, etc.

Certains opérateurs reprochent à l'ARCEP de les soumettre à des obligations croissantes, sources de coûts supplémentaires, et aux pouvoirs publics de leur appliquer de nouvelles taxes. Ce que j'ai dit, c'est que nous devions veiller à ce que les obligations et les charges que nous imposons aux acteurs économiques restent raisonnables.

Laure de La Raudière m'a interrogé sur le taux de co-investissement et de mutualisation en zone 1. Pour l'instant, la mutualisation concerne 10 % du stock complet de fibre optique. Cependant, les fibres posées depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation de l'ARCEP, prise conformément à loi Pintat, n'en représentent qu'une petite partie. C'est seulement dans à peu près un an que l'on devrait observer un taux de mutualisation significatif.

Comment financer le déploiement de la fibre optique à long terme quand le Fonds d'aménagement numérique aura épuisé les crédits du grand emprunt ? La taxation des paires de cuivre de France Télécom me semble l'exemple même de la fausse bonne idée, comme la réforme de la taxe professionnelle en donne d'ailleurs l'illustration. En effet, l'IFER, l'imposition forfaitaire sur les entreprises en réseaux, qui fonctionne exactement comme une taxe sur les paires de cuivre, a été entièrement répercutée sur les tarifs de gros de l'opérateur historique, c'est-à-dire le prix que ce dernier fait payer aux opérateurs alternatifs pour accéder à son réseau. Si cette imposition avait été normalement appliquée, les tarifs de gros payés par SFR, Free et Bouygues Télécom auraient donc augmenté dans des proportions considérables. Compte tenu des mécanismes qui régissent l'économie des télécommunications, il est impossible d'éviter qu'une taxe sur les réseaux de cuivre ne soit, in fine, payée à plus 50 % par les opérateurs alternatifs. C'est ce problème qui va conduire le Gouvernement à demander au Parlement une modification de la législation sur la contribution économique territoriale.

Mais une taxe sur les réseaux de cuivre aurait un autre inconvénient : les territoires où la paire de cuivre sera utilisée le plus longtemps, c'est-à-dire les territoires peu denses et ruraux, paieront plus que les territoires urbains, où la fibre remplacera rapidement le cuivre. Ainsi, paradoxalement, une mesure censée favoriser l'installation de la fibre optique dans les territoires moins denses reviendrait à handicaper ces derniers. C'est pourquoi j'ai parlé de fausse bonne idée.

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