Quelques mots vraiment pour répondre aux orateurs qui se sont exprimés au cours de la discussion générale.
Tout d'abord, je voudrais revenir au point de départ. Cette réforme n'est pas sortie de l'imagination de quelques technocrates ou de quelques élus sous l'influence de substances psychédéliques. Elle est issue de toute une série de rapports, rédigés par des hommes de droite, par des hommes de gauche, par des experts, qui, depuis une dizaine d'années, ont expliqué que notre système de gestion locale, resté inchangé pendant très longtemps, et vers lequel beaucoup de compétences avaient été décentralisées, ne fonctionnait plus de manière satisfaisante : il fallait clarifier les compétences, et lui donner une apparence plus simple pour nos concitoyens ; il fallait par ailleurs accentuer la démocratie locale. C'est à partir de cet ensemble de travaux et de réflexions que le comité Balladur a lui-même travaillé, et que le projet de loi du Gouvernement a ensuite été élaboré.
Je voulais le rappeler parce que, sur ce constat – et il est dommage qu'on ne le dise plus aujourd'hui –, il y avait un consensus très large. Toutes les forces politiques étaient convaincues qu'une réforme était nécessaire. Quand on entend certains aujourd'hui, on a l'impression que le statu quo est possible. Non, le statu quo n'est pas possible. Il faut faire évoluer les choses. C'est la première réflexion que je voulais faire en réponse à un certain nombre d'interventions.
Deuxièmement, je voudrais répondre, au sujet du conseiller territorial, à ce qui a été dit tout à l'heure par M. de Rugy, ainsi que par d'autres collègues. La création du conseiller territorial constitue un vrai changement, un changement très profond, qui va dans le sens du rapprochement entre les deux collectivités, région et département. Je peux me tromper. Dans cette affaire, c'est la vie qui, de toute façon, décidera. Mais je suis convaincu que, du fait que ces élus se retrouveront, par groupes, dans les départements, et ensuite, tous ensemble, dans la région, une cohérence s'établira progressivement, au fil du temps, dans la gestion de ces collectivités. Progressivement, une vision régionale se dégagera, qui sera articulée, sur le terrain, par les départements.
Peut-être que, demain, d'autres que nous iront plus loin et envisageront une fusion. Mais il ne pourra pas y avoir une véritable fusion, au niveau de la seule région, s'il n'y a pas, d'une manière ou d'une autre, en quelque sorte des circonscriptions d'action administrative, sur le terrain, à un niveau plus local, ne serait-ce que pour gérer un certain nombre de services, en particulier les services sociaux. Ces derniers, qui sont aujourd'hui bien gérés par les départements, doivent impérativement rester à ce niveau de proximité. C'est la deuxième réflexion que je voulais faire.
Quant au mode de scrutin, j'ai bien entendu tout ce qui a été dit. Ma position personnelle, vous le savez, n'était pas en faveur du mode de scrutin prévu par le texte qui vous est aujourd'hui présenté. J'avais imaginé d'autres dispositifs. Le comité Balladur avait fait d'autres propositions. Le débat politique a eu lieu, et il a abouti à ce qui vous est proposé.
Cela étant, je suis convaincu que ce qui vous est proposé va donner à la région un enracinement qu'elle n'a pas aujourd'hui. C'est une erreur terrible de penser que, sous prétexte que celles et ceux qui siégeront à la région seront élus dans des circonscriptions territoriales, il n'y aura pas de vision régionale. C'est là un point de vue qui me choque énormément. J'ai été conseiller régional, je suis aujourd'hui conseiller général. Le mode d'élection ne m'empêche pas de réfléchir aux grands enjeux du département dont je suis élu. Cette critique n'est pas recevable. Je suis convaincu que, au contraire, l'enracinement dans des territoires donnera à la région une réalité qu'elle n'a pas aujourd'hui. On l'a d'ailleurs vu à l'occasion des deux derniers renouvellements des conseils régionaux, cette année et il y a six ans : on constatait bien, dans le débat public, une méconnaissance par la population de l'action régionale, de celle des élus régionaux, voire de ces élus eux-mêmes. Je suis convaincu que le nouveau mode de désignation apportera une réponse à cette situation regrettable.
Le dernier point que je souhaite aborder concerne l'article 35 et les compétences. Je voudrais citer un alinéa, car j'ai le sentiment qu'un certain nombre d'orateurs ne l'ont pas lu : « [Le conseil général ou le conseil régional] peut en outre, par délibération spécialement motivée, se saisir de tout objet d'intérêt départemental pour lequel la loi n'a donné compétence à aucune autre personne publique. » C'est un point clef. Lorsque la loi précise qui est compétent, c'est bien sûr la collectivité en question qui exerce la compétence. Lorsque la loi ne prévoit rien, tant le département que la région peuvent se saisir, de par leur droit d'initiative, de cette compétence-là.
Ne dites pas que le système est fermé, il est au contraire extraordinairement ouvert. Nous voulons éviter l'exercice de la même compétence par plusieurs collectivités, sauf dans les cas que nous avons énumérés – nous le verrons lors de l'examen de l'article – et que nous avons complétés pour la deuxième lecture.
Il est important de comprendre l'article 35. Le dispositif envisagé et qu'à longuement repris M. le président Sauvadet dans son intervention, permettra dans chaque région à la collectivité régionale et aux collectivités départementales de déterminer, en début de mandat, comment elles exerceront concrètement et très précisément leurs compétences et les répartiront entre elles, alors que les élus seront les mêmes ; la répartition sera donc facile à faire. Elle pourra tenir compte des spécificités économiques et géographiques de ces régions et de leur dimension. En effet, une très grande région comme Rhône-Alpes ou PACA ne gérera pas cette répartition des compétences comme l'Alsace ou la Normandie. Il existe donc une possibilité d'expérimentation, de souplesse, qui me paraît aller dans le bon sens.
Le travail que nous avons effectué, tant dans les commissions que lors de nos différents débats, a été approfondi. Nous sommes parvenus à des propositions concrètes, pragmatiques et, j'en suis sûr, capables d'être mises en place sur le terrain.