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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 14 septembre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Explications de vote personnelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, au terme de ce débat, je souhaite donner mon avis personnel sur ce projet de loi, conformément à l'alinéa 13 de l'article 49 de notre règlement.

Il y a beaucoup à dire sur un texte aussi important. Il faut déplorer le « temps législatif couperet » qui ne permet pas aux députés de s'exprimer dans des conditions démocratiques.

Puisque cette réforme des retraites ne faisait partie ni du programme législatif de l'UMP ni du programme présidentiel, il aurait fallu qu'elle soit consensuelle, acceptée sur tous les bancs et même en dehors. Tel n'a pas été le cas. Le Gouvernement n'a pas négocié avec les syndicats. Le débat dans cet hémicycle a été complètement fermé. Les Français jugeront d'autant qu'ils n'ont eu droit qu'à des spots de propagande gouvernementale à la télévision !

Au prétexte de la crise, le but est de porter un véritable coup de poignard aux travailleurs, tout en épargnant la rente et le capital, ce qui a été largement démontré au cours du débat.

Des ouvriers de l'usine Umicore d'Auby, dans ma circonscription, m'ont envoyé un message d'alerte ce matin. Ils ont très peur. Si le projet de loi est adopté, les longues carrières seront lourdement pénalisées par l'allongement de l'âge de départ à la retraite. Pourquoi s'attaquer aux droits sociaux des travailleurs pour régler un problème de financement conjoncturel, dû à la crise ?

En 2009, 680 000 emplois ont été supprimés. Cela représente une perte de cotisations retraite de 10 milliards. Qu'attend-on pour interdire les licenciements dans les entreprises qui font des profits ?

Par ailleurs, augmenter d'un seul point les salaires représenterait un apport de 3 milliards de cotisations.

Alors, on le voit bien, casser les droits sociaux relève du cynisme absolu, de l'opportunisme.

Pire, le Gouvernement a profité de l'examen de ce texte pour faire passer un amendement qui remet en cause les missions de la médecine du travail. Le projet de loi contient en effet la partie législative de la réforme de la médecine du travail préparée en catimini par le ministère. L'argumentaire pour justifier l'entrée de dispositions sans rapport avec le sujet est tout simplement faux, comme l'indique le groupement national « Sauvons 1a médecine du travail ».

Le Gouvernement avance que « la mise en oeuvre des dispositions législatives relatives à la pénibilité fait jouer un rôle important aux services de santé au travail ». C'est tout simplement un nouveau mensonge. Faut-il rappeler que ce sont les médecins conseil de la sécurité sociale qui attribuent les invalidités professionnelles, et non les médecins du travail ?

Il faudrait aussi que les missions de ces services de santé au travail soient clairement définies par la loi. En réalité, ce sont les dispositions préconisées par le MEDEF qu'on nous ressert ici, dispositions que les organisations syndicales ont repoussées à l'unanimité il y a un an.

Si le chamboulement du code du travail se confirmait, ce ne serait plus les médecins du travail qui seraient chargés de la prévention médicale des risques professionnels, mais bien les employeurs, responsables de l'organisation du travail et des risques qu'ils font encourir aux travailleurs. Il faut refuser catégoriquement cette manoeuvre qui consiste à abroger la médecine du travail actuelle et à confier la santé des salariés à leurs propres employeurs.

Cela est complètement irresponsable. Est-ce par un amendement bâclé, présenté au dernier moment, que peut se régler le sort d'un des acquis de la Libération, voté à l'unanimité sur proposition du Conseil national de la Résistance, à savoir la médecine du travail ?

Je le dis avec gravité : couplé à l'allongement de la durée de cotisation et au report de l'âge de la retraite, ce projet fait courir aux salariés des risques énormes pour leur santé.

L'argent existe dans notre société pour financer le départ en retraite à taux plein, sans décote, à soixante ans et à cinquante-cinq ans pour les métiers pénibles, pour revenir sur la réforme Balladur et abroger la réforme Fillon.

Les revenus financiers ont été multipliés par plus de sept depuis 1980. Depuis trente ans, si l'espérance de vie à partir de soixante ans est passée de vingt à plus de vingt quatre ans, le montant des dividendes, lui, est passé de 3,2 % à 8,4 % du PIB ! En 2009, les entreprises du CAC 40 ont enregistré des bénéfices en baisse, mais elles vont tout de même versé à leurs actionnaires des dividendes en hausse, pour un montant total de 36 milliards d'euros. Entre 1997 et 2007, la part des bénéfices distribués aux actionnaires dans les entreprises est passée de 34,2 à 44,5 %.

Une question se pose alors : qui subit vraiment la crise ?

Une nouvelle mobilisation du monde du travail est prévue le 23 septembre prochain. Les Français vont descendre massivement dans la rue pour exiger le retrait de ce projet de loi inique. On va tout droit vers un emballement social, avec une grève générale reconductible afin d'obtenir le retrait du texte. Les Français auront le dernier mot ; souvenons-nous du CPE !

Je suis confiant, et, à titre personnel, sans présager de la position de mes collègues communistes, républicains et du Parti de gauche, je voterai contre ce projet de loi.

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