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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 14 septembre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 28

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Il y a aujourd'hui une très grande incertitude sur les niveaux d'activité et d'emploi futurs. Et faute d'une transformation profonde de notre mode de développement, il faut aussi envisager sérieusement la possibilité d'une stagnation longue, voire d'une récession à la japonaise, le monde ayant adopté une grande partie des travers du Japon des années 1980, à savoir une bulle immobilière et boursière généralisée et le surendettement de l'économie. Le Premier ministre lui-même en parlait il y a quelque temps.

Bâtir une réforme durable des retraites, c'est d'abord refonder notre développement sur des bases réalistes, dans un contexte de rareté des ressources, d'épuisement de la planète et d'essoufflement, voire d'arrêt complet, de la croissance. À un moment d'ailleurs, madame Lagarde, par une sorte d'oxymore mathématique, parlait de croissance négative. C'était une nouveauté. Maintenant, elle parle de la « ri-lance » ; c'est tout aussi nouveau mais cela ne veut pas dire grand-chose. On ne construira pas de modèle solide sur l'illusion de la croissance à venir ou du retour automatique au plein emploi.

En second lieu, la retraite est aujourd'hui un temps de vie au même titre que ceux de l'éducation et de l'activité, et non plus la gestion d'une fin de vie. Les transitions entre ces moments doivent être aménagées. Les besoins de temps libéré et de formation tout au long de la vie, la réduction tendancielle du temps nécessaire pour couvrir les besoins matériels doivent être partie intégrante de cette réflexion. La réduction du temps de travail n'est pas un dogme, c'est un constat. Elle est à l'oeuvre dans tous les pays, et depuis plus d'un siècle dans le nôtre. Elle se fait soit par le développement des temps partiels et du chômage, soit, comme à certaines époques en France, encouragée et encadrée par l'impulsion politique : réduction de la journée, de la semaine ou de l'année officielle de travail, durée de la scolarité et âge du départ en retraite. Ce mouvement de réduction doit être repris, en analysant sans complaisance les inégalités et les échecs de la mise en oeuvre des 35 heures. Il faudra être plus audacieux et plus complet, avec la ferme volonté politique de donner de nouveau à tous de nouveaux droits au temps libéré. Et cette réflexion est pour les Verts indissociable de celle sur les retraites. C'est pour nous une gestion globale des temps de la vie qui doit être pensée et financée.

Le troisième point porte sur la dépendance. Alors que les difficultés des régimes de retraite sont croissantes, on assiste à l'émergence d'un besoin nouveau : il y a de plus en plus de personnes âgées en situation de grande dépendance et la prise en charge de leur dépendance repose très fortement sur leurs familles. Au devoir de fournir un revenu à celles et ceux qui ne sont plus en âge de travailler, s'ajoute aujourd'hui, de manière pressante, un nouveau devoir. La société doit pouvoir fournir aux personnes âgées dépendantes une assistance médico-sociale qu'il s'agisse des soins, des repas, du ménage, de l'hygiène ainsi qu'un accompagnement en vue d'une fin de vie dans la dignité.

Le développement très rapide des maisons de retraite médicalisées privées à but lucratif pose des problèmes sociaux, moraux et politiques. Les familles sont de plus en plus fréquemment contraintes de financer la prise en charge de leurs ascendants devenus dépendants dans des maisons de retraite médicalisées. Il faut organiser un service public de la dépendance, avec une offre publique et un encadrement de l'offre privée, notamment sur le taux de profit, les modes de gouvernance, les conditions de vie et la qualité relationnelle. Ce secteur peut tout particulièrement relever de l'économie sociale et solidaire et ainsi permettre d'offrir une qualité de vie à un tarif maîtrisé.

Quatrièmement, je lance un appel pour une écologie du troisième et du quatrième âge. La plus grande erreur serait de polariser le débat sur le seul financement du pouvoir d'achat des retraités, ou même de la prise en charge médicalisée. Les personnes du troisième âge ont droit à une existence active dans la société, celles en grande dépendance doivent pouvoir bénéficier d'un accompagnement en fin de vie qui leur accorde la maximum d'autonomie et de confort. Cela relève d'une politique de l'offre de participation à la société et de services rendus par la société. Une politique fondée sur la solidarité, la réciprocité, la responsabilité intergénérationnelle, l'autonomie de chacun, bref une écologie de la vie. Elle doit se concrétiser sur le plan de l'urbanisme par une offre de logements, dès le début et insérés dans un réseau de voisinage, d'aide et de soins de proximité ; dans le domaine des services, par la constitution d'entreprises d'aide à domicile professionnalisées et doublement associatives en ce qu'elles associent le personnel du service à domicile d'une part, les aînés et leurs parents de l'autre et par le développement de la recherche gériatrique notamment préventive – on pense au régime alimentaire, au sport, etc.

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